Journal de bord en Turquie 🇹🇷 : Anatolie du sud-est
De retour en Turquie ! En partant, nous nous Ă©tions promis de revenir visiter un jour l'est du pays... et plus encore. En revanche, nous ne pensions pas le moins du monde le faire si tĂ´t.
MĂŞme s'il est dur de ne pas regretter la poursuite de notre voyage en Iran, ce qui est fait est fait. Et puis, la Turquie est si grande et son histoire si riche que nous ne risquons pas de nous ennuyer.
Ă€ nous les terres de l'est !
🌍 | Journal de bord de notre voyage sans avion
🚀 | Sur la route depuis février 2022
đź“Ť | France 🇫🇷 → Italie 🇮🇹 → Croatie đź‡đź‡· → MontĂ©nĂ©gro 🇲🇪 → Albanie 🇦🇱 → Grèce 🇬🇷 → MacĂ©doine du Nord 🇲🇰 → Kosovo 🇽🇰 → Serbie 🇷🇸 → Bulgarie 🇧🇬 → Turquie 🇹🇷 → GĂ©orgie 🇬🇪 → ArmĂ©nie 🇦🇲 → Iran 🇮🇷 → Turquie 🇹🇷 → Liban 🇱🇧 → Syrie 🇸🇾 → Jordanie 🇯🇴 → Arabie Saoudite 🇸🇦 → Émirats Arabes Unis 🇦🇪
~ ~ ~ ~ ~ ~
Jours 251 à 254 🇹🇷 - Autour du lac de Van
De Tabriz, Iran Ă Van, Turquie le 12 octobre 2022
Nos premiers pas en Turquie nous donnent l'impression de revenir Ă la maison. Enseignes connues, retour de l'alphabet latin et de mots familiers.
Nous remontons la grande avenue jusqu'à arriver chez Sertac, un jeune médecin généraliste qui nous accueille avec le sourire. Un peu pressé, il nous fait faire rapidement le tour de son appartement dans lequel nous louons une grande chambre. En effet, sa journée de travail n'est pas terminée. Il a simplement pris une pause pour nous ouvrir.
Nous posons nos sacs et nous allongeons dans notre grand lit confortable. Nos yeux se ferment tout seuls. Nous nous rendons compte que nous manquons de sommeil après cette succession de pays et d'émotions. Nous espérons que les prochains jours seront propices au repos.
Lorsque Sertac rentre du travail vers 18h, il nous propose de partager un repas tous ensemble. Assis par terre, nous en apprenons plus sur lui et sa famille. Il n'est pas turc mais kurde et ses parents vivent dans un village à la frontière iranienne. La vie peut être rude dans cette région, particulièrement en hiver. L'Anatolie orientale se trouve en effet sur des haut-plateaux à près de 1700 mètres d'altitude. Nous passons un excellent moment tous les trois.
Peu après, nous sortons faire un tour dans le centre-ville. Il s'agit surtout d'une rue principale commerçante où se succèdent des dizaines de boutiques, de cafés et de restaurants. De retour à l'appartement, nous nous écroulons de fatigue.
Van, Turquie le 13 octobre 2022
Le principal attrait de Van, c'est son immense lac salé. Avec le lac Sevan (Arménie) et le lac d'Ourmia (Iran), c'est l'un des trois grands lacs de l'ancien royaume d'Arménie. Ils sont si grands qu'il furent surnommés les « mers d'Arménie ».
Des hommes se sont installés aux abords de ces lacs depuis des millénaires, comme le royaume d'Ourartou qui a bâti la forteresse de Van au VIIIème siècle avant JC.
Du centre-ville, nous prenons la direction de la forteresse. Le bus nous dépose du mauvais côté de l'immense rocher sur lequel elle fut construite. L'emplacement est géographiquement parfait, il s'agit de l'unique point culminant des environs. Du bas, nous contemplons les falaises abruptes de plusieurs dizaines de mètres de haut, surélevées par d'imposants murs.
Un homme nous indique que l'entrée se situe de l'autre côté. En vérifiant l'itinéraire sur Maps.me, nous nous rendons compte que cela nous prendra bien plus d'une demi-heure. En route. Nous longeons d'abord les ruines de l'ancienne capitale Tushpa d'où s'élèvent encore quelques minarets.
En arrivant de l'autre côté, nous trouvons porte close. L'entrée semble fermée et la grande allée abandonnée. Il n'y a pas grand monde à qui demander notre route. Un épicier un peu plus loin nous explique qu'il faut escalader le mur d'enceinte à un endroit où le grillage a été abattu. Nous doutons un peu de son conseil et je lui demande en rigolant si la police peut nous arrêter pour une telle intrusion. Il me répond « Police, no! Police, no! » la main sur le coeur. Nous sommes rassurés en voyant un groupe de jeunes lycéens faire de même devant nous.
Nous y voilà enfin. Il ne reste plus qu'à traverser le parc et à commencer l'escalade. Nous retrouvons un peu plus loin une route mieux entretenue et plus officielle. Nous croisons d'ailleurs de nombreux touristes turcs et iraniens. Il y avait donc bel et bien une vraie entrée, tant pis.
La montée est l'occasion pour nous d'admirer l'architecture de la forteresse. Les remparts sont faits de pierres taillées dans du basalte, sur lesquelles se dresse un mur de briques en terre et de traverses en bois.
La vue à 360° est majestueuse. Nous nous asseyons tous les deux et contemplons les environs. D'un côté, nous pouvons admirer distinctement le mont Erek et ses 3200 mètres d'altitude et de l'autre, l'immense lac de Van. Bien que le ciel soit voilé au-dessus du lac, nous réussissons même à apercevoir le mont Süphan, un stratovolcan éteint qui culmine à 4100 mètres d'altitude.
Le retour est un peu plus facile, nous attrapons directement le bon bus évitant ainsi toute la marche. Nous passons une seconde soirée géniale avec Sertac à boire du thé et à discuter de nos voyages respectifs, en particulier de son tour d'Europe entre Paris, Bruxelles et Madrid.
De Van Ă Tatvan, Turquie le 14 octobre 2022
Après deux belles journées passées chez Sertac à l'est du lac de Van, nous poursuivons notre route jusqu'à la ville de Tatvan, située sur l'autre rive. Le lac est si grand qu'il nous faut pas moins de deux heures de route pour le contourner.
Nous marchons sur 2 kilomètres afin de s'éloigner du centre-ville. Puis, nous posons nos sacs et commençons à faire de l'auto-stop à un grand carrefour routier. Cet essai est plus que concluant. En moins de 5 secondes, une camionnette s'arrête à notre hauteur. Les deux ouvriers se rendent à Gevas, un peu plus loin sur la route. C'est parti ! Ils nous déposent comme prévu après 40 kilomètres effectués à vive allure.
Adrien n'a même pas le temps d'enlever son sac de son dos qu'un camion s'arrête à notre niveau. Il se rend justement à Tatvan, c'est idéal. Notre vitesse de croisière est certes plus faible avec notre cargaison pleine de ciment, mais quel bonheur de monter dans notre premier poids lourd du voyage. Son chauffeur, Yasar, est charmant, on discute tant bien que mal en alternant gestes et mots trouvés sur Google Traduction. Le trajet passe vite entre chansons kurdes et jolies vues sur le lac, malgré une météo nuageuse.
Comme la plupart des villes turques, Tatvan s'articule autour d'une très longue route principale. Nous l'empruntons, toujours à bord de notre énorme camion. Il y a énormément de trafic et des piétons de partout. Aucun souci pour Yasar, il nous dépose en pleine route, en face de notre hôtel. Au plus simple, on adore.
Nous faisons le tour de la ville à la nuit tombée. À première vue, rien de bien extraordinaire à visiter. Nous apprécions tout de même la grande promenade le long du lac. Nous dégustons de délicieux lahmacun et rentrons à l'hôtel. Une belle journée nous attend demain.
Tatvan, Turquie le 15 octobre 2022
La nuit a été plutôt bonne. Nous nous rendons dans la salle de petit-déjeuner et profitons du grand buffet. Puis, nous préparons notre sac à dos en le remplissant d'eau, d'habits chauds et de bureks au fromage, tout chauds eux aussi. Nous longeons la grande avenue afin de quitter la ville à pied. Le stop en ville, c'est quasiment mission impossible.
Après quarante minutes d'une marche dynamique, nous arrivons à l'embranchement de la seule route qui mène à notre objectif du jour, le cratère de Nemrut (Nemrut Krateri). Ce volcan endormi culmine à environ 3000 mètres d'altitude. La vue d'en haut s'annonce magique.
Bien que nous soyons sortis de la ville, nous sommes encore à 20 kilomètres de notre objectif. Il n'est pas envisageable de monter tout là -haut à pied. On s'installe le long d'une glissière de sécurité et on croise les doigts, en espérant qu'un véhicule veuille bien nous y amener.
4 minutes plus tard, une voiture blanche s'arrête à notre hauteur. Chanceux et reconnaissants, nous montons à bord et faisons la connaissance de Yunus Emre et de ses deux beaux-frères. Quelle surprise quand on se rend compte que Yunus parle très bien français ! Turco-belge, il habite dans la région d'Izmir et se rend très régulièrement en Belgique pour le travail.
La communication est facilitée ce que nous apprécions fortement, eux comme nous. L'un des beaux-frères de Yunus est prof de géographie à Batman, il connaît bien les lieux et est ravi de nous les présenter. Explorer ce volcan, bénéficier de ses explications grâce aux traductions de Yunus, c'est aussi improbable que génial ! Le hasard fait parfois si bien les choses.
Le Nemrut est un stratovolcan dormant, le plus récent des volcans du sud-est anatolien. Sa dernière éruption date de 1962. Son cratère (caldeira elliptique) est le plus grand de Turquie et l'un des plus grands du monde, il fait 7 kilomètres de diamètre. Rien que ça !
Ce qui est impressionnant dans cet immense cratère, c'est ce qui s'y trouve. On y découvre le lac du cratère de Nemrut (Nemrut Krater Gölü), situé à 2247 mètres d'altitude et dont la profondeur maximale est de 155 mètres. Il s'agit du 2ème plus grand lac de cratère du monde. Deux autres lacs plus petits se sont également formés juste à côté.
Le tout donne un magnifique mélange. Je dirais même que c'est l'un de nos plus beaux panoramas du voyage. On a tantôt l'impression d'être arrivés sur une autre planète, tantôt aux abords d'un lac, tantôt en pleine forêt aux couleurs automnales, tantôt au coeur de sources d'eau chaude. Le fait de le vivre avec Yunus, Erdal et Erdal (ses deux beaux-frères ont le même prénom), rend le moment encore plus beau.
Nous buvons un çay dans le petit café fait de bric et de broc au pied du lac. Deux choix s'offrent à nous pour la suite de la journée. Trouver un autre véhicule pour rentrer sur Tatvan ou continuer la route avec nos trois nouveaux copains jusqu'au village d'Ahlat. Nous ne réfléchissons pas bien longtemps et remontons tous les cinq en voiture.
Ahlat, nous ne connaissons pas. Mais je me souviens qu'hier, Yasar, le chauffeur du camion, nous a dit d'y aller car c'est çok güzel (très beau en turc). Nous ressortons du volcan en empruntant une piste poussiéreuse et arrivons à Ahlat une bonne demi-heure plus tard.
Nous nous arrêtons à l'entrée du village où se situe un cimetière seldjoukide, le plus grand de Turquie. 8200 stèles ont été découvertes actuellement sur plus de 21 hectares. Le Selçuklu mezarligi est un endroit très particulier, dépaysant et chargé d'histoires. Les pierres tombales ont été sculptées au XIème siècle. Leurs tailles et les décorations qui les recouvrent varient selon la fonction et l'importance de la personne enterrée.
Nous terminons l'après-midi dans le seul café jugé à peu près correct par Yunus. Plusieurs thés et cafés plus tard, il est temps de reprendre la route. Nos copains nous déposent à Tatvan et poursuivent leur route jusqu'à Batman, ils ont rendez-vous chez leur oncle qui les attend de pied ferme pour dîner.
On a adoré cette journée passée à leurs côtés, aussi improbable qu'exceptionnelle. Nous sommes plus que reconnaissants que ce voyage nous apporte des moments et des rencontres aussi extraordinaires.
Jours 254 à 260 🇹🇷 - Mardin et la grande plaine de Mésopotamie
De Tatvan Ă Mardin, Turquie le 16 octobre 2022
Billets réservés à l'avance, sacs sur le dos, nous sommes fin prêts pour le départ ce matin. La réservation indique que le bus part de la gare routière de Tatvan. En arrivant à son emplacement, rien. Le gardien de l'hôtel d'à côté nous indique qu'il n'y a pas, ou plus, de gare routière. À la place, il nous dit d'attendre le long de la grande route et que le bus viendra nous chercher. Nous y trouvons une agence de voyage et une sorte de café, mais pas d'arrêt. Les véhicules passent à toute allure devant nous et nous sommes les seuls voyageurs. Drôle d'endroit pour prendre son bus.
L'attente est longue et frustrante. De nombreux cars roulant sur la voie de gauche passent devant nous sans s'arrêter. 11h30, 11h45, 12h. Déjà 30 minutes de retard et toujours rien. Le stress monte, on se dit qu'on ne doit pas être au bon endroit. Nous décidons de faire signe à partir de maintenant à tous les bus de la bonne compagnie, afin de ne pas louper le nôtre. 12h25, j'en repère un au loin qui roule plus lentement que les autres. J'arrive à lire le petit panneau posé contre le pare-brise : « Mardin ». Il est enfin là ! Nous poussons un soupir de soulagement.
Des montagnes à la plaine, c'est ainsi que se caractérise ce long trajet de Tatvan à Mardin. Nous passons en quelques heures des hauts plateaux arméniens à la Mésopotamie. C'est le moment de réviser rapidement nos cours d'histoire-géographie de 6ème.
La Mésopotamie est une grande plaine fertile située entre les fleuves du Tigre et de l'Euphrate. En faisant le parallèle avec l'époque moderne, elle couvre une partie de l'Irak, de la Syrie et le sud de la Turquie. Elle a abrité presque toutes les grandes civilisations, leurs heures de gloire et les tragédies qui sont liées à leurs déclins.
Nous sommes plus qu'impatients de contempler de nos propre yeux le « berceau de la civilisation ».
Pour l'heure, nous allons de barrage militaire en barrage militaire. À chaque fois c'est la même rengaine. Des hommes en arme font signe au chauffeur de se garer. Un policier monte et demande à voir toutes les cartes d'identité. Il les survole du regard et nous repartons. Nous ne comprenons pas bien l'intérêt de la démarche, mais soit.
Le soleil est déjà couché lorsque nous sommes déposés à un rond-point de la ville nouvelle de Mardin. Il nous reste encore 140 mètres de dénivelés à grimper pour rejoindre notre logement. Un bus de ville nous épargne heureusement ces efforts. Notre hôte nous attend, quel plaisir d'être accueillis avec un bon thé !
Mardin, Turquie le 16 octobre 2022
Nous ressortons pour dîner sur les coups de 20h. Nous nous laissons tenter par un falafel tenu par des Syriens. Nous nous installons à une petite table basse le long de la seule route accessible aux voitures qui traverse le vieux Mardin. On se régale, cela faisait longtemps qu'on n'avait pas mangé de plat autre que des kebabs et tous leurs dérivés.
Une voix familière nous interpelle alors que nous sommes encore assis : « Comment ça va les amis ? » Je lève la tête et voit qu'une voiture blanche s'est arrêtée à notre niveau. Je reconnais alors Yunus et ses deux beaux-frères, le sourire aux lèvres. Que font-ils là ?
Nous nous étions quittés il y 24 heures à Tatvan et voilà qu'on les retrouve par hasard plusieurs centaines de kilomètres plus loin. Ayant terminé notre repas, nous les suivons pour une visite nocturne de Mardin, qui se termine inévitablement par un thé sur la terrasse panoramique d'un café.
Après une petite heure à discuter, il est enfin temps de se dire au revoir. Cette fois-ci, on ne devrait plus se croiser car leurs vacances touchent à leur fin. Ils nous invitent à passer un jour dans leurs villes respectives, Izmir, Batman et Atça.
Mardin, Turquie le 17 octobre 2022
Contrairement à notre habitude, nous ne sommes pas réveillés par les premières lueurs du jour. Il faut dire que nous logeons dans une maison semi-troglodyte plutôt sombre, qui n'est pas sans nous rappeler la Cappadoce.
La particularité de Mardin est d'avoir été construite sur le versant sud d'une colline surmontée d'une crête rocheuse qui fait face à la plaine de Mésopotamie. Véritable labyrinthe, la vieille ville est traversée par des dizaines de rues et ruelles, reliées entre elles par d'innombrables escaliers. Les maisons, de couleur ocre, sont toutes surmontées de rooftop, des toits-terrasse parfois vides, parfois meublés. Elles semblent se superposer les unes sur les autres.
Nous savourons d'avance nos futures explorations en nous rendant dans une cantine deux rues plus bas. Le repas est excellent, nous déplorons tout de même les tarifs un peu élevés pour un menu relativement simple.
Nos pas nous amènent un peu au hasard au niveau de la mosquée Şeyh Çabuk, au portail soigneusement sculpté. Son architecture est caractéristique de Mardin.
Nous continuons un peu plus loin et arrivons dans le petit bazar. Parfois couvert, parfois ouvert, il abrite quelques boutiques bien moins clinquantes que celles de la rue principale. C'est le lieu idéal où flâner. Les vendeurs exposent leurs produits, dont certains diffèrent de ce que nous avons l'habitude de voir en Turquie. À Mardin, il est possible d'acheter du tabac et du coton en vrac, de très beaux foulards, mais aussi de petits biscuits fourrés à la figue.
Au niveau du joli bâtiment des PTT, nous faisons connaissance avec l'âne poubelle. Ils forment avec son guide un binôme très efficace afin de ramasser les déchets dans les passages les plus inaccessibles de la ville.
Nos pas nous amènent finalement sur l'inévitable place Cumhuriyet Meydani. De là , on aperçoit les remparts du château plus haut, malheureusement fermé à la visite. Pour revenir à l'appartement, rien de tel que d'emprunter une nouvelle enfilade de ruelles, charmantes à l'image de la ville.
Mardin, Turquie le 18 octobre 2022
Des miaulements nous réveillent. Plusieurs chats rôdent depuis deux jours autour de notre chambre. Ils tentent de rentrer et réclament notre petit déjeuner, ce qui est plutôt agaçant. Heureusement pour nous, nous changeons aujourd'hui d'hébergement.
Notre nouvelle maison d'hôtes se trouve elle aussi dans la vieille ville. Il nous suffit de longer la rue principale pendant une quinzaine de minutes et de gravir la rue des chats juste après le bâtiment des PTT. Étonnés par ce nom, nous découvrons une ruelle colorée, parsemée de jolies maisonnettes et de toutes sortes d'installations prévues et confectionnées pour nos amis à quatre pattes. Construites en bois, peintes et disposées ça et là à gauche et à droite du passage, elles font partie du décor, tout comme leurs habitants.
Nous arrivons chez Ali une centaine de mètres plus loin. Sa maison typique est tournée vers l'extérieur. Elle est construite tout en hauteur et décorée avec goût, ni trop peu, ni trop chargé. Au rez-de-chaussée, trois chambres donnent sur une petite cour intérieure aux couleurs blanches et bleues. Un premier escalier amène à un demi-étage comportant un petit salon ouvert et quelques cordes à linge. Les marches suivantes montent à la salle de bain, puis un peu plus haut à la cuisine et à notre grande chambre. Tout en haut enfin, une splendide terrasse nous attend sur le toit. La vue y est époustouflante et nous enchante. Charmés par les lieux, nous demandons à Ali s'il est possible d'étendre notre séjour ici.
Après deux jours passés ici, il est grand temps d'aller nous ravitailler en nourriture. Notre nouveau logement se trouve tout en haut de la vieille ville et le supermarché le plus proche tout en bas. La descente, par une ruelle tout en escaliers, est facile et agrémentée par de jolies bâtisses. Nous passons devant un hammam typique ouvert soit aux hommes, soit aux femmes en fonction des heures de la journée. Pourquoi pas y revenir plus tard.
Une fois nos victuailles achetées, nous entamons la remontée. Éprouvante, nous envions presque l'âne aperçu la veille. Nous profitons heureusement d'un très beau coucher de soleil depuis la terrasse. L'instant est calme et enchanteur.
Dara, Turquie le 19 octobre 2022
La région aux alentours de Mardin possède une histoire riche. Yunus nous a justement parlé il y a quelques jours des ruines de la cité de Dara, qui se trouve à une quarantaine de kilomètres au sud-est de Mardin. Ali ayant accepté que l'on reste un jour de plus, nous avons le temps de nous y rendre.
Dara est une ancienne garnison perse fondée par le roi Darius III, celui là même qui affronta Alexandre le Grand lors de sa conquête de l'est. Il faut ensuite attendre près de 800 ans pour que l'empereur romain Anastase décide de la reconstruire durant les années 503-507. Il transforme la garnison en une forteresse byzantine majeure, destinée à garder la frontière entre l'Empire romain d'Orient et l'Empire sassanide (peuple iranien). Elle tombe dans l'oubli à la suite de sa destruction par les Mongols. Les années sont passées et Dara est redevenu un petit village rural, où se côtoient paysans et touristes. Les ruines de la forteresse sont accessibles librement et le tout forme un véritable musée à ciel ouvert.
En étudiant un peu les possibilités de transport en commun, nous nous rendons compte qu'aucun bus ne dessert le village. Ce n'est pas grave, nous irons en auto-stop. Nous descendons au niveau de la route principale et levons le pouce. Une minute plus tard, un homme s'arrête à notre hauteur. Il nous amène jusqu'à un carrefour stratégique, d'où part la petite route de campagne qui rejoint Dara. Elle semble peu fréquentée, mais nous sommes prêts à attendre. C'était sans compter notre chance. Nous sommes pris presque immédiatement par une famille et leur petit chien, qui n'a de cesse d'essayer de nous lécher durant les quelques kilomètres restants. Voilà , nous sommes arrivés en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire.
Nous commençons par explorer la nécropole. Nous sommes étonnés par le nombre de touristes turcs présents sur les lieux, tous arrivés dans d'énormes cars d'ailleurs. Heureusement pour nous, leur emploi du temps est assez serré et il est assez facile d'explorer les lieux entre deux arrivées.
La nécropole servait à enterrer les morts de la garnison. Elle se trouve à l'emplacement de la carrière d'où ont été extraites les pierres de la forteresse. On y retrouve plusieurs types de tombes en fonction des années et des croyances de l'époque. Certaines sont construites dans des cavités qui nous font penser à la Cappadoce, d'autres sont plus simples et aussi plus anciennes. Tout au fond du site, il est possible d'entrer dans une impressionnante galerie funéraire, creusée dans la roche sur plusieurs niveaux. Elle contiendrait les ossements de milliers de légionnaires romains tombés au combat durant la guerre contre les sassanides. La nécropole est dédiée à Mithra, une divinité vénérée par les peuples iraniens de l'antiquité.
Par la suite, nous traçons notre propre itinéraire en allant aux différents points d'intérêt, les restes du mur d'enceinte, un pont sur l'ancienne rivière aujourd'hui asséchée, un arsenal et des bâtiments divers. Le point d'orgue de la visite est sans conteste la citerne. Indispensable pour résister aux sièges des sassanides, nous découvrons avec étonnement un véritable joyau d'architecture. L'éclairage nous permet de prendre la mesure de cet édifice sous-terrain aux dimensions impressionnantes.
Nos visites terminées, nous reprenons l'auto-stop dans l'autre sens. C'est les cheveux au vent à l'arrière d'une camionnette de chantier que nous parcourons les 5 kilomètres qui nous séparent de la grande route. Le reste du trajet est tout aussi facile et fluide, d'abord dans un camion au chauffeur très sympathique et ensuite à l'arrière d'une Renault.
En rentrant, nous recevons un message de Frieder et Amira. Heureux hasard, nos amis du Gipsy village viennent d'arriver à Mardin et ils nous proposent de passer la soirée ensemble. Émilie est là elle aussi, accompagnée de sa soeur Joséphine et d'une amie à elle Laura. Le programme est aussi simple que parfait, kebab, bières et belles discussions.
Mardin, Turquie le 20 octobre 2022
Après cette soirée retrouvailles qui s'est prolongée tard dans la nuit, la matinée est plutôt sous le signe de la détente. Grasse mat' d'abord puis hammam sont au programme.
Le hammam repéré la veille est ouvert aux femmes de 12h à 19h. J'y rejoins donc Amira, Emi, Joséphine et Laura pour une après-midi entre filles. À peine les portes du vieux bâtiment franchi, on entend déjà des voix fortes et enjouées au loin. Nous payons l'accès (2€) et choisissons l'option gommage en plus (1€). Nous ne savons pas trop à quoi nous attendre mais nous nous laissons guider.
À côté de l'entrée se trouve des petits casiers fermés dans lesquels on nous invite à déposer téléphones et argent. Ensuite, nous entrons dans la première pièce. Grande, tout en longueur et haute de plafond, nous arrivons dans une sorte de salon. D'énormes banquettes bien confortables sont disposées sur toute la longueur. Tout le monde y a déposé affaires de rechange, nourriture et serviettes. Nous observons les dames qui sont arrivées juste avant nous et comprenons bien rapidement que cette pièce fait également office de vestiaire. Nous nous mettons en maillot de bain, chaussons des claquettes et entrons dans le vif du sujet.
Le hammam est composé d'une pièce centrale au milieu de laquelle trône une grande pierre. Autour se trouvent de nombreuses petites salles rondes attenantes. On nous indique l'une d'elles. Nous nous asseyons alors, chacune, à gauche ou à droite d'un bassin d'eau vide. À nous d'actionner les robinets. L'un pour l'eau brûlante, l'autre pour l'eau bien fraîche. Sous le regard amusé de nos trois voisines, nous nous rinçons et lavons, c'est bien pour ça que nous sommes là .
Au bout de quelques minutes, la petite fille installée à côté de moi, s'amuse avec quelques grimaces. Nous lui rendons avec plaisir, la glace est brisée. Sa maman, lui lave les cheveux plusieurs fois. Elle lave ensuite les cheveux de sa maman. Et puis, dans sa lancée, elle propose à chacune de nous. Nous comprenons alors que bien plus qu'un lieu pour se laver, le hammam est un lieu d'échanges et de partages.
L'ambiance est bonne. Des dames de tout âge, leurs filles, leurs mères, toutes les générations sont là . On se lave, on discute et on mange ! Manger des fruits, des légumes et du pain à la cannelle dans le hammam, c'est tout à fait normal ici. Étonnées les premières secondes, on accepte finalement bien volontiers ce qu'on nous donne.
Puis, il est temps de passer au gommage. Chacune notre tour, on vient nous chercher. On s'installe sur la pierre centrale et c'est parti pour quelques minutes de décrassage. Vu le nombre de peaux enlevées, on a bien fait !
Après deux bonnes heures, il est temps de retourner dans le salon. Tout en papotant, on se rhabille. Détendues, on en a vraiment bien profité. Il est temps d'aller retrouver les garçons.
Au programme, soirée entre copains sur le rooftop, falafel, houmous et thé à la menthe.
Mardin, Turquie le 21 octobre 2022
Le temps file vite. C'est déjà notre dernière journée à Mardin. Nous avons fait la veille la connaissance de Jared, un américain en voyage. Mais pas que, il travaille aussi à mi-temps tout en voyageant. Ce mode de vie nous donne des idées, pourquoi pas un jour.
À Mardin, les religions chrétiennes et musulmanes cohabitent depuis des siècles. Les églises côtoient les mosquées de manière tout à fait naturelle, à une différence près. Tandis que les lieux de culte musulman sont visibles grâce à leur minaret, ou audibles grâce à leurs haut-parleurs, les églises chrétiennes sont discrètes et se fondent dans le décor.
Nous commençons notre visite par l'église des Quarante Martyrs. Construite en 539 à l'époque byzantine, elle fut construite à la mémoire des 40 chrétiens de Cappadoce martyrisés et tués sous l’ordre de l’empereur romain Licinius. L'intérieur nous semble familier avec ses voûtes, ses rangées de sièges et ses scènes de la Bible peintes. Des messes y sont régulièrement données par la communauté syriaque orthodoxe.
En continuant notre tour de la ville, nous arrivons au niveau d'une église protestante très discrète. Sa petite cour intérieure est particulièrement agréable pour se reposer à l'abri du soleil. C'est assez étonnant de constater qu'autant de religions sont représentées dans une ville aussi petite.
Une belle montée nous attend pour nous rendre à notre dernier point d'intérêt. Il s'agit du madrasa Zinciriye, célèbre pour ses deux coupoles panoramiques. Nous apprécions le calme de sa moquée que les touristes, trop pressés de se rendre sur la terrasse, oublient de visiter. D'étonnantes pierres semi-transparentes ornent le pourtour du mihrab, la niche orientée en direction de la Mecque et dans laquelle l'imam dit la prière. Nous rejoignons par la suite la terrasse supérieure et profitons d'une belle vue sur toute la ville.
Au retour de la journée, nous retrouvons Frieder et Amira qui partageront notre chambre ce soir. Émilie et Laura nous rejoignent peu après sans Joséphine, rentrée au Danemark, elles dormiront dans une chambre du rez-de-chaussée.
18h, nous partons Frieder et moi au hammam. De retour de cette expérience, nous profitons d'une dernière soirée avec tout le monde.
Jours 260 à 262 🇹🇷 - Jardins et musiques kurdes à Diyarbakir
De Mardin Ă Diyarbakir, Turquie le 22 octobre 2022
Difficile de se réveiller après une nuit orageuse. L'heure est au départ pour Clémence et moi. Il nous tarde de nous rendre à Diyarbakir, une ville méconnue des touristes dont on nous a pourtant dit le plus grand bien.
Alors que nous terminons de prendre notre petit-déjeuner sur le toit de l'auberge, j'entends Émilie m'appeler depuis les étages inférieurs. Je descends la voir et elle m'explique que la police est là .
« Comment ça la police ? »
Au moins 8 hommes habillés en civil viennent en effet de rentrer dans la cour intérieure. Deux d'entre eux montent les escaliers à ma rencontre. Ils m'expliquent qu'ils sont là pour une histoire de taxe, qui ne nous concerne pas directement. Ils souhaitent cependant vérifier l'identité de tous les occupants. L'ambiance est particulière en ce dernier matin à l'auberge.
Les policiers sont amicaux, mais pas pressés. Ils finissent par nous faire signer un papier attestant qu'on a bien logé chez Ali. Toute la procédure a quand même pris une bonne heure et demie. Pour couronner le tout, un orage éclate au moment exact où nous nous apprêtons à partir.
Départ raté ! Nous reposons nos sacs et attendons une petite demi-heure supplémentaire le retour du soleil.
Suite à toutes ces péripéties, il est déjà midi passé lorsque nous franchissons enfin les portes de l'auberge. Nous achetons un durum et débutons l'auto-stop. Un conducteur nous amène jusqu'à la grande route. Là , les choses s'avèrent un peu plus compliquées. De longues minutes passent. Personne ne se rend à Diyarbakir. Un jeune homme très sympathique finit par s'arrêter à notre hauteur. Il nous propose de nous amener à la station de bus. C'est d'accord.
Le dolmus nous dépose sur une grande avenue non loin de la gare routière de Diyarbakir. Il ne nous reste plus qu'à rejoindre notre hôte Onur. Dit comme ça, les choses paraissent simples. Sauf que la ville est immense et que nous ne comprenons pas le moins du monde où, ni comment, prendre le bus.
Le GPS indique une heure de marche, mais pas de dénivelés. Allons-y !
Diyarbakir, Turquie le 23 octobre 2022
La veille, nous avons fait la rencontre d'Onur, un musicien chanteur, dont la mission est de contribuer à l'écriture du zazaki, un dialecte kurde, avant qu'il ne tombe dans l'oubli. Sa mission est d'autant plus importante que le zazaki est principalement parlé. Personne ne l'avait écrit avant les années 2000.
C'est sur ses conseils avisés que nous montons dans un dolmus jusqu'à l'entrée de la vieille ville. Cette fois-ci, les choses sont bien plus simples. Nous pouvons monter dans n'importe quel dolmus passant par Dagkapi et s'y arrêter. C'est d'autant plus simple qu'il y en a toutes les deux minutes et que leurs conducteurs savent se faire remarquer via leur klaxon.
Véritable guide touristique, Onur nous a concocté un programme aux petits oignons. L'itinéraire qu'il nous a montré sur la carte va nous faire passer par tous les points d'intérêts. Idéal.
Autrefois appelée Amida, Diyarbakir est une ville à l'histoire ancienne. Considérée symboliquement comme la capitale de la nation kurde, elle a de tout temps été au centre des attentions. D'abord capitale de royaumes araméens, elle fut conquise et fortifiée par les Romains et les Byzantins. Ensuite, ce fut au tour des Ottomans. Les troubles récents dans la région ont malheureusement touché la ville. En effet, une grande partie du centre historique de la ville fut détruite durant les répressions militaires de 2016 et 2017.
Déposés devant les hauts murs en basalte de Diyarbakir, nous nous rendons d'abord au château à travers des rues pavées pleines de caractère. L'intérieur est néanmoins un peu décevant. Les bâtiments encore debout et ceux reconstruits ont été transformés en musée, si bien que nous nous contentons de les admirer de loin.
La suite est bien plus intéressante. Depuis la rue principale, nous rejoignons la célèbre auberge Hasan Pasha. Nous entrons par une grande porte voûtée, presque comme dans une forteresse. Il s'agissait à l'époque de protéger les voyageurs qui venaient s'y abriter après de longues chevauchées. Ses murs sont composés d'une alternance de pierres blanches et noires très harmonieuse et de longues toiles tendues protègent sa grande cour centrale du soleil. Des boutiques de souvenirs et de petit artisanat sont désormais implantées au rez-de-chaussée.
Je suis surtout frappé par le brouhaha ambiant. Il y a un monde fou en ce second jour de week-end. Des centaines de tables sont dressées sur une bonne partie de la cour et au premier étage. L'auberge est réputée pour ses copieux khavaltis. C'est vrai qu'ils nous font envie, mais ayant déjà déjeuné, nous passons notre tour.
Nous remontons ensuite la rue principale jusqu'aux quartiers est, en pleine reconstruction. Les nouvelles constructions sont certes harmonieuses, mais tout est trop neuf, sans âme. Nous préférons nous diriger jusqu'aux remparts sud, en explorant au passage les quartiers plus populaires.
Diyarbakir n'a pas été construite là au hasard. Non loin coule le fleuve Tigre, qui forme avec l'Euphrate le bassin Mésopotamien. Ces deux fleuves coulent vers le sud et se rejoignent au niveau de la mythique cité de Babylone, dans l'actuelle Irak.
Le trésor de Diyarbakir est agricole. Les terres situées entre ses remparts et le fleuve sont en effet cultivées depuis la nuit des temps. Elles sont pour cela inscrites au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2015, sous l'appellation de jardins de l'Hevsel.
Assis sur les remparts de la tour Keçi Burcu, nous contemplons les jardins de l'Hevsel pendant de longues minutes. Soudain, j'entends un « hello » derrière mois. Une jeune fille me tend son téléphone où sont écrits les mots suivants : « Je vous ai vus dans le bus à Mardin et vous êtes très mignons ».
Je me souviens que ce jour-là , nous venions de passer 7 heures dans le bus entre Tatvan et Mardin. Autant dire que nous n'étions pas au top de notre beauté. Comme quoi, malgré nos efforts pour être discrets, nous ne passons pas inaperçus dans ces régions où il y a peu de touristes non turcs.
Par la suite, nous profitons de l'ambiance très animée de ce dimanche après-midi. Les rues sont désormais si bondées qu'il est difficile de marcher. Le moment est idéal pour nous réfugier dans une seconde auberge, la Suluklu Han (Sülüklü Han), transformée en café. Jared, notre ami américain de Mardin, ainsi qu'Onur nous ont conseillé d'y déguster un Reyhan Serbeti, un assemblage de plusieurs jus. Un régal.
Une dernière étape nous attend : la visite de la Grande Mosquée. Certains disent qu'elle est le reflet de la mosquée des Ommeyyades de Damas de par leurs similitudes architecturales. La lumière douce de cette fin d'après-midi est sublime.
Pour rentrer, nous nous rendons de nouveau à la porte Dagkapi où passent les dolmus. Très vite, nous nous retrouvons totalement bloqués par les embouteillages. Des policiers semblent bloquer l'axe principal de la ville. Nous restons là une bonne trentaine de minutes. Les véhicules sont alors tous débloqués en même temps dans le chaos le plus total. Et puis rebelote, nous sommes arrêtés devant la base militaire. Des véhicules officiels en noir passent alors devant nous à toute allure. Je blague en disant à Clémence que nous venons de voir passer le président Erdogan.
En arrivant à la maison, nous apprenons que le président turc est bel et bien venu à Diyabakir aujourd'hui. Cela explique peut-être l'énorme drapeau à son effigie sur les remparts de la forteresse.
Nous passons une seconde soirée avec Onur. Il est rentré plus tôt de sa garde à l'hôpital, ce qui nous permet d'apprendre à mieux le connaître. Posés dans son salon autour d'un café, de cigarettes et de substances illicites, nous alternons les discussions sérieuses sur l'histoire et les origines du peuple kurde et les péripéties rocambolesques arrivées à ses amis. Il conclut la soirée en nous chantant de très jolies chansons kurdes de sa composition.
Jours 262 à 267 🇹🇷 - Urfa, aussi appelée Sanliurfa « la glorieuse »
De Diyarbakir Ă Urfa, Turquie le 24 octobre 2022
Après 3 heures de trajet sur une autoroute longiligne et en très bon état, nous arrivons à vive allure à la gare routière d'Urfa. Nous nous mettons alors en route pour rejoindre notre Airbnb. Nous traversons l'autoroute à pied à deux reprises, ce qui est devenu plutôt très commun depuis quelques mois. Le logement se situe dans la ville nouvelle, nous y posons nos affaires et ressortons aussitôt. Sur les conseils de notre hôte, nous prenons la direction de la vieille ville pour trouver de quoi dîner.
Il fait déjà bien sombre. L'obscurité des petites ruelles n'invite pas vraiment à flâner, nous reviendrons demain. Nous tentons de nous repérer sur le GPS quand Adrien aperçoit une tête connue. Par le plus grand des hasards, nous tombons sur Jared, notre copain américain rencontré à Mardin quatre jours plus tôt.
Nous profitons d'une belle soirée improvisée tous les trois. Pour cela, rien de mieux qu'un bon restaurant. Jared nous amène au Çardaklı Köşk Sıra Geceleri, où nous découvrons le kebab d'Urfa. Miam.
Urfa, Turquie le 25 octobre 2022
Certaines matinées sont plus communes que les autres. Nous avons passé celle-ci à faire notre lessive, essorage à la main en prime.
Jared nous a donné rendez-vous dans l'après-midi pour une dégustation très spéciale. Une petite demi-heure de marche nous attend jusqu'au lieu de rendez-vous. Nos premiers pas nous donnent l'impression d'avoir changé de pays. De par ses influences arméniennes, kurdes et syriennes, Urfa est différente de ses voisines Mardin ou encore Diyarbakir. La ville, autrefois appelée Edesse, semble bien plus traditionnelle. Beaucoup de femmes sont voilées, parfois même intégralement et le pantalon est de rigueur pour les hommes.
Nous traversons le souk et nous rendons au parc de Golbasi, le lieu incontournable de la ville. Oasis arborée, loin des klaxons et des rues animées, le parc est très harmonieux et bien entretenu. Nous y trouvons la mosquée Mevlid-i Halil et la cave dans laquelle Abraham, le prophète des trois grandes religions monothéistes, serait né.
Voici ce que j'ai pu lire sur la légende d'Abraham :
« Une nuit, Nemrod, le puissant roi Assyrien, qui règne sur la région, voit en songe la destruction de son trône. Ses oracles interprètent le rêve par la venue d’un nouveau prophète qui brisera sa toute puissance. Le rebelle devrait naître dans l’année.
Nemrod ordonne alors que toutes les femmes enceintes et les jeunes mâles soient éliminés. La mère d’Abraham, enceinte, se cache durant toute sa grossesse dans la fameuse grotte jusqu'à lui donner naissance. Elle y éduque par la suite Abraham durant de nombreuses années.
Parvenu à l’âge adulte, Abraham, de passage dans la ville d'Urfa, fit reproche aux habitants d'adorer les dieux multiples. Pour lui, il n'y a qu'un dieu unique. Il discute de cela avec le puissant Nemrod, mais ce dernier refuse de se convertir. Il arrête et condamne Abraham à mort : « qu'il soit jeté du haut de la citadelle dans un brasier ardent ».
À l’instant où Abraham atteint les flammes, celles-ci, par la grâce de Dieu, se transforment en eau et les bûches en poissons. »
Le parc est très touristique ce qui offre un contraste étrange avec le sacré des lieux. Il est possible de se déguiser en tenues d'autrefois afin de se prendre en photo devant le bassin d'Abraham (Balikligöl en turc), ou encore d'acheter des graines pour nourrir les carpes. Elles nagent par centaines dans les eaux du bassin. On raconte que nul ne doit les toucher. Si on venait à le faire, en portant après sa main aux yeux, on deviendrait aveugle.
Qu'on y croit ou pas, l'endroit est enchanteur.
L'heure du goûter approchant, nous dégustons nos premiers künefe avec Jared. Cette pâtisserie est réalisée à base de cheveux d'ange, de fromage, de beurre et de pistaches. Une fois disposée dans l'assiette, on l'arrose de sirop. Le mélange fromage et pâtisserie sucrée est plutôt étonnant. C'est bon, mais aussi un peu écoeurant. Pour la petite histoire, le plat aurait été créé et prescrit par des médecins pour satisfaire la faim des califes pendant le Ramadan.
Nous poursuivons nos vadrouilles dans le labyrinthe de la vieille ville. Beaucoup plus accueillante que la veille, nous errons dans un dédale de petites ruelles et de beaux bâtiments, cachant de jolies cours arborées. Nous nous arrêtons dans l'une d'entre elles que rien ne distingue. Nommée Café Muaf, l'endroit est splendide. La cour intérieure est conviviale et invite à la discussion. On s'y sent à l'écart des intrigues de la ville. Les boissons sont originales, en particulier le menengiç kahvesi. Préparée comme un café turc, les grains de café ont été remplacés par des pistaches térébinthe sauvages. Ils proposent même un vin rouge très savoureux.
Le temps file, l'heure est déjà venue de faire nos aurevoirs à Jared. Ses histoires et sa philosophie de vie nous ont inspirés. Nous lui souhaitons le meilleur pour sa future vie de digital nomade. Et qui sait, peut-être que nos routes se croiseront à nouveau.
Urfa et Göbekli Tepe, Turquie le 26 octobre 2022
Aujourd'hui, nous prenons la poudre d'escampette. Enfin on ne va pas bien loin, seulement à 20 kilomètres. Arrivés vers 11h à l'arrêt, on cherche des informations pour savoir à quelle heure passe le prochain bus, sans succès. Un agent des transports vient à notre rencontre et nous explique dans un mélange d'anglais et de turc que le bus sera là dans une heure.
À midi, toujours rien. On lui redemande, il nous redit dans une heure. On comprend alors qu'il ne nous dit pas « dans une heure », mais « à une heure ». Nous aurons donc perdu 2 heures. On essaye toujours de privilégier les bus quand il y en a, sauf que très honnêtement, en Turquie, l'auto-stop est toujours l'option la plus rapide.
À 13h donc, nous montons bel et bien dans le bus n°0 direction Göbekli Tepe. Une dizaine de touristes, mieux renseignés, monte avec nous.
Göbekli Tepe, c'est tout simplement le plus ancien temple connu du monde. Incroyable mais vrai, il date d'environ 12 000 ans, à une époque où l'Homme n'était que chasseur-cueilleur. Le site a été découvert en 1963 et les fouilles de grande ampleur ont débuté en 1995.
On paye nos tickets à l'entrée, puis on monte dans une navette qui nous amène au site archéologique à quelques centaines de mètres de là . Pour être honnêtes, nous aurions très bien pu y aller à pied.
Déposés aux abords du site, nous empruntons une passerelle en bois qui fait le tour du site. Ce chemin passe par les quatre principaux temples mis au jour. On y découvre tout un ensemble de mégalithes décorés d'animaux et dressés en cercle. Quand on pense que les plus anciens vestiges datent du Xème millénaire avant notre ère, c'est assez incroyable. Par comparaison, Göbekli Tepe est plus vieux de 6000 ans que Stonehenge en Angleterre et plus vieux de 7000 ans que les pyramides d'Égypte.
Ce sont surtout les dimensions des piliers qui interrogent. Certains pèsent près de 40 tonnes et mesurent 5 mètres de haut. Sauf qu'à l'époque de la construction du site, les outils étaient très précaires et l'agriculture n'avait pas encore été inventée. Göbekli Tepe laisse depuis place à de très nombreuses théories, qui vont jusqu'à remettre en question la place de la religion dans la sédentarisation des Hommes.
Nous redescendons une heure plus tard afin de visiter une petite exposition complémentaire. Elle propose notamment un son et lumière qui met dans l'ambiance d'un rituel qui devait avoir eu lieu il y a 12 000 ans.
Nous rentrons finalement à Urfa en empruntant à nouveau le bus n°0, après avoir passé environ 2 heures et demie sur place.
Urfa et Harran, Turquie le 27 octobre 2022
Dernier jour à Urfa, nous reprenons la poudre d'escampette direction la ville d'Harran à 50 kilomètres plus au sud. La route est toute droite et très empruntée par les camions. Nous ne nous trouvons qu'à quelques kilomètres de la Syrie. De part et d'autres de la route, des petites boules blanches volent dans l'air. On est en pleine saison du coton. Les champs en sont recouverts. Des montagnes de coton ont d'ailleurs déjà été récoltées. C'est magnifique.
Harran est connu pour plusieurs raisons : une sévère défaite des légions romaines en juin 53 avant JC, le lieu de vie du patriarche Abraham ainsi qu'une partie de sa famille, avoir vu naître la plus ancienne université mondiale et ses maisons atypiques.
Je n'ai même pas un pied en dehors du dolmus qu'un monsieur m'accoste pour me proposer de faire le tour de la ville avec lui. Je décline. Il insiste en me disant qu'à pied ce n'est pas possible. Connaissant bien la flemme des Turcs à marcher, je décline à nouveau. Adrien sort à son tour du minibus. Il lui propose également. On finit par s'éloigner.
Nous franchissons la porte qui permet d'accéder à la partie ancienne de la ville. Nous tentons de nous repérer grâce à Maps.me et en à peine 5 minutes nous apercevons au loin ce pourquoi nous sommes venus.
Les maisons traditionnelles d'Harran sont construites en forme de ruche. Réalisées avec une matière s'apparentant à de l'argile mélangée à de la paille et nommée adobe, elles sont caractéristiques de la Turquie et d'une partie de la Syrie. Elles se présentent généralement avec une base rectangulaire et un toit triangulaire. Les coupoles permettent de garder la fraîcheur à l'intérieur.
Ces maisons étaient encore utilisées il y a quelques décennies par les habitants d'Harran, qui leur préfèrent aujourd'hui les appartements plus modernes. Ces maisons traditionnelles sont cependant conservées comme lieu de stockage, musée ou café.
Nous déambulons dans les petites ruelles du village. Tout semble à la fois pauvre et peu entretenu. Nous trouvons néanmoins un peu plus loin plusieurs ensembles de maisons en meilleur état. Un homme nous fait signe de venir les visiter, elles sont en libre accès. Il nous explique qu'il s'agit de la maison de son grand-père et que son travail consiste à protéger le patrimoine de son village. L'entretien de telles maisons est permanent, tant l'adobe est sensible aux aléas du climat.
L'intérieur de la maison est rustique. Les pièces en enfilade se succèdent, chacune possédant une fonction propre : cuisine, chambre, salle à manger. On comprend aisément que les habitants préfèrent désormais vivre dans des maisons plus modernes.
Nous poursuivons notre chemin sous un soleil de plomb jusqu'à arriver aux ruines de l'Université d'Harran, aussi appelée le madrasah d'Harran. Elle fut fondée par le calife omeyyade Umar II en 717 en regroupant tous les érudits de la région. On la considère comme l'une des plus anciennes universités du monde. À son apogée au IXème siècle, elle regroupait plus de 8000 étudiants et des matières aussi diverses que les mathématiques, la philosophie, la médecine, l'astrologie, l'astronomie et les sciences naturelles.
En rentrant à la maison, nous nous rendons dans un petit restaurant de Tantuni. Il s'agit d'un plat épicé composé de boeuf ou de poulet coupé en julienne, sauté avec un soupçon d'huile de coton. Nous le dégustons dans sa version au yaourt, enveloppé de pain à durum. Ce très bon plat conclut parfaitement nos quelques jours à Urfa.
Jours 267 à 271 🇹🇷 - Retrouvailles avec la Méditerranée à Mersin
D'Urfa Ă Mersin, Turquie le 28 octobre 2022
500 kilomètres séparent les villes d'Urfa et de Mersin. Nous ne sommes pas habitués à parcourir des distances aussi grandes et pourtant nous sommes plus que contents de retrouver la mer. Nous l'avions quittée à Antalya début juillet. Près de 4 mois plus tard, nous revoilà ! Ce retour sur la côte méditerranéenne est aussi imprévu qu'excitant.
Après une très longue journée de transport, nous posons nos sacs à dos chez Fatih, un jeune turc de 26 ans. À peine arrivés, nous ressortons tous les trois manger un bout. Fatih nous propose ensuite de l'accompagner pour une longue promenade le long de la plage.
C'est l'occasion parfaite pour faire mieux connaissance. Fatih est un étudiant très motivé. Quand il n'étudie pas pour son doctorat en ingénierie mécanique, il est vendeur dans une boutique de téléphonie. Au final c'est simple, il travaille 7 jours sur 7. Respect.
Mersin, Turquie le 29 octobre 2022
Un bateau ? Quel bateau ?
De bon matin, nous demandons à Fatih d'appeler pour nous la compagnie de ferry Med Star afin de connaître la date du prochain départ. Et oui, nous quittons la Turquie très bientôt. La nouvelle tombe : ils ne partiront pas ce week-end et nous invitent à rappeler lundi.
Aujourd'hui, nous sommes le 29 octobre. Cette date est fériée et très fêtée en Turquie, car c'est le 29 octobre 1923 que Mustafa Kemal alias Atatürk est devenu le premier président de la République de Turquie.
Qui dit jour férié en Turquie, dit drapeaux gigantesques étendus entre les immeubles, sur chaque façade et à chaque fenêtre. Le portrait d'Atatürk est présent littéralement partout. La démesure turque ne cesse de nous étonner.
Deuxième chose importante lors des jours fériés, les transports en commun sont gratuits. Nous sautons sur l'occasion pour visiter le centre-ville de Mersin. Fatih nous prévient qu'il n'a pas grand intérêt, mais tant qu'à être là , autant y faire un tour.
Une heure de bus nous attend. En effet, Mersin est une mégalopole qui s'est considérablement agrandie ces dernières années. Pour seulement 40 000 habitants en 1958, la ville compterait plus d'1 500 000 habitants aujourd'hui. Des Turcs majoritairement, mais également beaucoup de Russes et de Syriens. Les buildings flambant neuf remplacent les citronniers et les orangers. Sur la côte, les immeubles poussent plus vite que les champignons. Et pourtant, ce n'est pas encore assez vite. Les loyers ne cessent d'augmenter et Fatih nous explique qu'il est difficile de se loger avec un salaire moyen.
À bord de notre bus, nous longeons les grandes artères à vive allure et descendons finalement aux abords du parc Atatürk, encore lui. Nous parcourons quelques rues et passons devant la Grande Mosquée et la cathédrale de Saint Antoine de Padoue.
C'est vrai que l'endroit est assez décevant, il manque le charme de l'ancien. En chemin, nous faisons deux pauses gourmandes avec d'abord un petit jus revigorant et ensuite notre second künefe du voyage.
Puis, nous remontons dans un bus en direction de la marina. Par le plus grand des hasards, nous tombons sur Fatih non loin de l'entrée ! Nous ne savions pas que sa boutique était à la marina. La surprise est d'autant plus belle. Il travaille aujourd'hui jusqu'à 19h, et oui, même les jours fériés.
La marina est réputée pour ses boutiques, ses cafés, ses restaurants et son ambiance. Mais on l'avoue, on n'a pas été super emballés. Elle aurait tout à envier à nos ports français qui ont bien plus de charme et d'authenticité.
Fatih nous convie le soir venu à un concert. À l'occasion de ce jour férié, la ville de Mersin organise un festival gratuit sur la longue promenade qui borde la Méditerranée. Il y a énormément de monde, tous les jeunes du coin semblent s'être donné rendez-vous ici. Nous achetons des bières et profitons de l'ambiance du concert d'Edis, un chanteur au style assez proche du Matt Pokora des années 2000 avec des feux d'artifices et des danseurs.
Mersin, Turquie le 30 octobre 2022
Dimanche matin. Il fait beau, il fait chaud, alors on enfile nos maillots. Nous arrivons Ă la plage une petite demi-heure plus tard. Outre quelques influenceuses russes, nous sommes presque les seuls.
Le reste de la journée est plutôt simple : baignade, farniente, baignade, bronzage et repos. Ne sachant pas à quoi nous attendre pour la semaine qui arrive, nous décidons de prendre une petite journée de vacances.
Mersin, Turquie le 31 octobre 2022
Un bateau ? Pas de bateau.
Fatih vient d'appeler la compagnie Med Star et leur réponse est claire, aucun départ avant mardi ou mercredi. C'est un peu frustrés que nous prolongeons notre séjour ici d'une journée.
N'ayant pas de réel programme, nous faisons un tour du quartier jusqu'aux ruines de Pompéï, qu'il n'est pas possible de visiter. La chaleur nous pousse à vite rentrer.
Jour 272 🇹🇷 - Tasucu, l'étape la plus surprenante de ce voyage
De Mersin Ă Tasucu, Turquie le 1er novembre 2022
Un bateau ? Peut-ĂŞtre...
Assis sur le canapé de Fatih, nous croisons les doigts. Il parle depuis quelques minutes au téléphone avec la dame de la compagnie Med Star. Verdict, une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise, c'est qu'aucun départ n'est prévu aujourd'hui. La bonne, c'est que le bateau vient de rentrer au port et qu'il repartira bientôt.
Plutôt que de tourner autour de Mersin, nous préférons prendre les devants et nous rendre dès aujourd'hui à Tasucu. Nous repérons un très bel hôtel au pied d'une plage avec vue sur la mer.
Nous rejoignons la grande route littorale à pied. Un dolmus passe, nous montons dedans. Rien de plus facile. Il ne nous dépose malheureusement pas à destination mais s'arrête à Silifke, à une dizaine de kilomètres du port. Aucun souci, nous sortons de la gare routière et commençons l'auto-stop. Il ne faut pas plus de 2 secondes pour qu'un homme ne nous embarque avec lui.
Plutôt que d'aller directement à l'hôtel, nous avons donné rendez-vous à Frieder et Amira à l'agence Med Star afin d'acheter nos billets et d'essayer d'en savoir plus. Et oui, nos amis allemands embarquent avec nous. À vrai dire c'est même eux qui nous ont suggéré d'effectuer cette traversée un peu folle avec eux.
Nous sommes déposés avec nos bagages juste devant l'agence aux alentours de 13h. Amira et Frieder nous rejoignent, ils ont tout laissé à leur campement. À l'intérieur, nous posons toutes nos questions au seul employé qui parle un peu anglais. Sa réponse va changer totalement le cours de notre journée : « The departure is tonight, you should be here at 5pm. » (« Le départ est pour ce soir, vous devez être à l'agence à 5h. »)
Comment ça ce soir ? Nous comprenons vite que notre après-midi plage tombe à l'eau et que toute la suite est à revoir. Nous n'avons pas réservé de logement pour notre prochaine destination, nous n'avons pas fait de courses et encore plus stressant, il faut qu'on trouve 7500TL (400€) en cash car il n'est pas possible de payer par carte bancaire. De leur côté, Frieder et Amira doivent en plus aller chercher leurs affaires à environ une heure de route aller.
La course contre la montre démarre pour eux. De notre côté, l'ambiance est un peu plus relax. Après avoir payé les billets via quelques retraits à la banque, nous laissons tous nos bagages à l'agence et sortons faire un tour de Tasucu.
Nous nous arrĂŞtons d'abord au Ceyhun, un excellent restaurant le long de la route. Puis nous faisons rapidement le tour du port de pĂŞche. Tasucu est une petite ville avec beaucoup de charme, cela change de Mersin.
De retour pour 17h, le moment est venu de patienter. Parfois, les choses se passent sans que nous puissions influer sur leur cours. Et puis, après deux longues heures, une voiture vient nous chercher et nous amène à la douane portuaire. Là , nous attendons une nouvelle fois. Nos passeports sont enfin tamponnés. Ça y est, nous sommes sortis officiellement de Turquie.
Ce second passage en Turquie fut magique et très intense. Moins touristique, l'est du pays est une région très particulière aux influences moyen-orientales et persanes fortes et à l'histoire riche et complexe. Nous y avons fait de merveilleuses rencontres que nous ne sommes pas près d'oublier, Sertac à Van, Yunus Emre et ses beaux-frères à Tatvan, Jared à Mardin et Urfa, Onur à Diyarbakir et Fatih à Mersin, et tous les autres rencontrés quelques minutes ou quelques heures.
Nos perspectives, un peu Ă©teintes en partant d'Iran, sont bien meilleures. Comme quoi il est toujours possible d'aller de l'avant.
Place désormais à une nouvelle aventure. Et celle-ci s'annonce assez exceptionnelle.
~ ~ ~ ~ ~ ~
Merci d'avoir lu jusqu'au bout ❤️
C'est bel et bien Ă bord d'un navire roulier que nous prenons le large en direction du Liban.
Plus qu'un blog voyage, nous partageons nos péripéties au fur et à mesure de notre aventure comme on les vit, avec passion et sincérité. Si tu veux nous adresser quelques mots, tu peux nous contacter sur nos pages Instagram : Clémence et Adrien.