Journal de bord en Turquie 🇹🇷 : l'Anatolie centrale
Ça y est, après 4 mois de voyage, nous arrivons au carrefour de l'Europe et de l'Asie. Les paysages changent, les couleurs aussi. L'Orient, cette contrée aux mille merveilles, nous ouvre ses bras. Le moment d'écrire un nouveau chapitre de notre périple est venu.
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Jours 152 à 155 🇹🇷 - Konya, au coeur de la tradition
Konya, Turquie le 06 juillet 2022
Comme dans toutes les grandes villes turques, le bus nous dépose à la gare routière située loin du centre-ville. Cette fois-ci, cela nous arrange puisque nous avons rendez-vous avec Ibrahim, notre hôte pour les trois prochaines nuits, au Japon Kyoto Parki. Après avoir pris le tram pendant cinq stations, nous y arrivons comme convenu vers 16h30.
Au bout d'une vingtaine de minutes, inquiets de ne pas trouver Ibrahim, Adrien se dirige vers un groupe de trois jeunes filles qui semblent fêter un anniversaire. Il leur demande s'il est possible d'emprunter leur téléphone.
Adrien appelle notre hôte. C'est alors que les filles nous tendent non pas une, mais deux assiettes remplies à ras bord de feuilles de vigne et de boulgour, sans oublier quelques baklavas et une part du gâteau d'anniversaire aux fruits. Tout est fait maison, on se régale. La gentillesse turque toujours. Ibrahim répond au téléphone et indique qu'il nous attendra devant le café du parc dans quinze minutes. Nous profitons de nos trois nouvelles rencontres sans pour autant pouvoir nous éterniser.
Après quelques échanges hyper sympathiques et de chaleureux remerciements, nous prenons la direction du point de rendez-vous. Nous ne manquons pas d'admirer ce magnifique parc japonais qui nous rappelle beaucoup l'Île de Versailles de Nantes. Nous attendons encore longuement Ibrahim. Nous ne passons pas inaperçus dans ce parc de banlieue avec nos têtes de touristes et nos deux gros sacs à dos. Il ne se passe pas cinq minutes sans que quelqu'un veuille nous aider. Les locaux ont du mal à comprendre ce qu'on fait là. En effet, il n'y a aucun hôtel dans les parages et ils ne semblent pas connaître le site Airbnb et encore moins son fonctionnement.
À 17h30, Ibrahim pointe enfin le bout de son nez. Nous sommes rassurés et contents que cette journée de transport se termine. Arrivés chez lui, il se fait vite excuser son retard autour d'un bon café accompagné de centaines d'abricots de son jardin. Journaliste de profession, un évènement grave survenu à l'hôpital de la ville l'a retenu juste avant notre arrivée.
Nous passons notre première soirée avec lui. Père de trois enfants et marié à une slovène, il nous explique que sa petite famille est justement en vacances en Europe. Nous dînons tous les trois et sortons découvrir son quartier résidentiel. Nous apprécions, pour la première fois depuis des jours, la légère fraîcheur nocturne.
Konya, Turquie le 07 juillet 2022
Nous avons si bien dormi que nous n'avons pas entendu Ibrahim partir au travail. Nous nous levons en forme, prêts à aller visiter la ville. Une heure de tram est nécessaire pour rejoindre le centre-ville. Konya est en effet une immense ville de deux millions d'habitants et notre logement se trouve à une bonne dizaine de kilomètres du centre.
Suivant les conseils avisés de notre hôte, nous commençons notre journée par le musée-mausolée de Mevlana. Au coeur de l'Anatolie anatolie-centrale et de la vieille ville de Konya repose Djalâl ad-Dîn Muhammad Rûmî, un mystique soufi persan. On lui donne le surnom de Mevlana qui signifie le guide. Mevlana fonda au XIIIème siècle l'ordre des derviches tourneurs, l'une des principales confréries soufies.
L'endroit où nous sommes, gratuit, contient en son sein le mausolée de Mevlana et en fait un haut lieu de pèlerinage en Turquie. C'est d'ailleurs ce que nous observons aujourd'hui. Quelques touristes étrangers sont présents mais ce sont bien une majorité de Turcs qui sont là en recueillement. L'architecture du mausolée et des bâtiments qui l'entourent est remarquable.
Nous visitons ensuite la belle Selimiye mosque. Puis, à l'entrée de l'effervescent bazar de Bedesten, nous nous laissons tenter par deux petits sandwichs / kebabs pour la modique somme de 1,2€ pour deux. Rassasiés, nous en profitons pour déambuler dans les nombreuses allées du grand bazar à ciel ouvert. À l'heure du déjeuner, il est bondé.
Quelques rues plus loin, nous passons aux abords du medrese Siracali. Le bâtiment est fermé mais nous découvrons de belles mosaïques bleues à travers ses grilles.
Après cette matinée bien chargée, nous marquons une pause au Ala'ad-Dîn Hill Park, le parc central du centre-ville qui, comme son nom l'indique, se trouve sur une petite colline. Nous profitons d'une petite heure de repos à l'ombre des arbres avant de nous rendre à la mosquée Ala'ad-Dîn Camii, située au sommet de la colline. Sans le savoir, nous venons d'entrer dans l'une des plus belles mosquées de notre séjour en Turquie. En fait, cette ancienne basilique chrétienne a été convertie en mosquée à partir de 1155, ce qui fait tout son charme.
À sa sortie, nous tombons sur Ercan et ses deux enfants de onze et douze ans. Ils parlent autant anglais que nous parlons turc. Et pourtant, armés de notre traducteur et du langage des signes, nous faisons connaissance. Ni une ni deux, Ercan nous propose de poursuivre l'après-midi avec eux. Nous redescendons de la mosquée ensemble et prenons place tous les cinq à bord de leur voiture.
Ercan conduit notre petite troupe au Panorama Konya Museum. Dans ce musée destiné aux enfants, nous découvrons plus en détail la vie de Mevlana et de ses parents jusqu'à l'émergence des derviches tourneurs. Cela vient parfaire à merveille nos apprentissages du matin.
Juste à côté, un magnifique bâtiment nous intrigue. Il s'agit du mémorial sur la guerre d'indépendance de Turquie. Ses colonnes sont gravées dans le bois avec une incroyable minutie.
Toujours accompagnés de cette petite famille, nous nous dirigeons ensuite vers une sorte de halle aux artisans. Plusieurs ateliers sont présents, de la céramique aux chapeaux traditionnels des derviches. De vrais bons moments avec notre famille du jour.
Nous les quittons en fin de journée après qu'Ercan se soit bien assuré qu'on monte dans le bon tramway et nous passons la soirée avec Ibrahim.
Konya, Turquie le 08 juillet 2022
Ce matin, c'est crêpes ! En voyage, c'est le moyen de passer un bon moment et de remercier nos hôtes. En effet, comme tu peux l'imaginer, on ne peut pas transporter grand chose dans nos sacs à dos. Il faut souvent composer avec ce que l'on trouve sur place. De la farine, des oeufs et du lait, il y en a partout. En plus, Ibrahim n'a jamais mangé de crêpes. Il est grand temps d'y remédier.
Surtout qu'il nous quitte en fin de matinée. Il rentre en effet dans son village pour célébrer le Kurban Bayrami (que l'on connaît en France sous le nom d'Aïd al-Adha). Il s'agit de la fête du sacrifice qui dure pendant quatre jours et qui a lieu soixante-dix jours après la fin du ramadan. Les trois prochains jours s'annoncent chômés et très festifs dans tout le pays.
Alors que la journée s'annonçait calme, Clémence reçoit un message de Maren. Ils viennent d'arriver à Konya et proposent qu'on passe la journée ensemble. Tu te souviens d'eux ? Nous avons rencontré Maren et Gerrit à Antalya lors de la visite guidée de la ville. Nous nous donnons rendez-vous au Kültür Park et nous dirigeons vers la rue Atatürk Caddesi pour un bain de foule auquel on ne s'attendait pas. Tous les habitants semblent s'être donnés rendez-vous pour faire des emplettes en ce jour de l'arefe. Durant toute la fin d'après-midi, on a littéralement l'impression d'être un 24 décembre en France, comme si tout le monde essayait de boucler ses derniers achats de Noël.
Cette fois-ci, Maren et Gerrit n'ont pas mangé avant de nous rejoindre. Nous nous mettons donc en quête d'une pide (à prononcer pidé) un peu spéciale, dont la longueur n'a pas d'égale dans toute la Turquie. Nommée etliekmek à Konya, il s'agit d'une pide d'un mètre de long ! Rien que ça. Nous en commandons d'abord deux, puis une troisième. Un régal.
Enfin, nous prenons la direction du Kültür Merkezi pour finir la soirée en beauté en assistant à une représentation des derviches tourneurs. Malheureusement, Kurban oblige, la cérémonie prévue tous les vendredis soirs est annulée. On se retrouve bien bêtes face à cette porte close.
Petite explication tout de même sur ce que nous aurions dû voir ce soir : les danseurs effectuent des tours sur eux-mêmes en allant de plus en plus vite et en étant guidés par un maître spirituel, le shaik. Accompagnés par des instruments traditionnels et des prières chantées, l'objectif de cette danse est d'atteindre une certaine forme de transe et de se rapprocher ainsi de dieu. Si tu veux en savoir plus, rendez-vous sur Youtube. C'est en tout cas ce qu'on a fait.
Nous faisons à nouveau nos adieux à nos copains allemands, mais qui sait. Ne dit-on pas jamais deux sans trois ?
Konya, Turquie le 09 juillet 2022
Konya, la spirituelle, nous a charmés et surpris. Certes le voile est davantage porté et le short moins courant que sur la côte, mais l'ambiance qui règne ici est bienveillante. La ville nous a ouvert l'esprit sur l'étendue et la diversité des croyances musulmanes et ce n'est pas rien.
Nous avons désormais hâte de poursuivre notre découverte de l'Anatolie anatolie-centrale. En route, pour la tant désirée et mythique Cappadoce.
Jours 155 à 162 🇹🇷 - La Cappadoce, une semaine magique
De Göreme à Ürgüp, Cappadoce, Turquie le 09 juillet 2022
Notre bus nous dépose à Göreme, au coeur de la Cappadoce, vers 13h30. Pour ce séjour, nous avons préféré loger à Ürgüp, une ville voisine plus grande et moins touristique. Ce choix nécessite de trouver le dolmus qui relie les deux villes entre elles.
Nous patientons de longues minutes, bien installés à l'arrêt de bus indiquant Ürgüp sur un énorme panneau bleu. Vingt minutes plus tard, un jeune homme vient s'asseoir à côté de nous. Nous lui demandons s'il va lui aussi à Ürgüp, il répond par l'affirmative et nous explique que le bus passe dans une vingtaine de minutes. L'attente en plein soleil est longue, mais le bus pointe enfin le bout de son nez. De nombreuses personnes en descendent et nous nous précipitons à l'intérieur. Dans l'euphorie de la montée, nous oublions de vérifier si le jeune homme est bien à bord lui aussi.
Au bout de quelques centaines de mètres, je me rends compte qu'on ne prend pas du tout la bonne direction. J'en avertis Adrien, qui tente de se frayer un chemin entre les bagages et les passagers pour demander au conducteur où nous allons. Le bus va à Avanos, totalement à l'opposé !
On comprend alors que le bus fait des allers-retours Avanos-Ürgüp et qu'il n'y en a qu'un seul dans chaque sens. Nous avons alors deux choix : continuer jusqu'à Avanos et faire ensuite tout le chemin retour jusqu'à Ürgüp, ou alors descendre, patienter sur le bord de la route et monter dans ce même bus une heure plus tard. Il n'y en a de toutes façons pas d'autres puisque dans la foulée, nous avons loupé celui dans l'autre sens.
Légèrement saoulés de notre erreur, nous décidons de rester à bord. Un gentil monsieur qui parle anglais négocie avec le chauffeur le fait qu'on ne paye que le trajet Avanos-Ürgüp et nous voilà partis pour une balade d'une heure dans la Cappadoce. Quelle entrée en matière !
Deux heures après notre arrivée à Göreme, nous arrivons enfin chez Yavuz. Il nous accueille dans une ravissante maison troglodyte. Je pense qu'on perd bien 15°C juste après avoir franchi la porte d'entrée, c'est incroyable et un peu déstabilisant. Yavuz nous explique qu'il a mis environ un an à totalement rénover cette maison et que cela ne fait que quelques mois qu'il y habite. Il a également créé trois chambres spacieuses qu'il propose à la location. Nous faisons partie de ses tout premiers clients.
À peine arrivés, il nous concocte un bon déjeuner qui nous fait très plaisir et nous redonne des forces. Yavuz, un brin hyperactif, nous propose de ressortir sitôt notre repas terminé pour aller admirer le coucher de soleil. Sauf qu'il n'est que 17h. Il nous embarque alors dans un roadtrip improvisé en 4x4 à travers les pistes poussiéreuses de la Cappadoce. Une bière à la main, le volant dans l'autre.
Les paysages sont magnifiques et si différents de tout ce que l'on a connu auparavant. La Cappadoce compte en effet de nombreuses vallées, toutes avec une particularité bien propre et des vues à couper le souffle. L'environnement est très minéral et de nombreuses maisons et églises troglodytes ont été creusées un peu partout. Les pistes nous amènent dans quelques petits villages en pierre, aussi charmants que difficiles d'accès.
Pour couronner le tout, nous nous arrêtons à l'un des points de vue les plus prisés pour le coucher de soleil. Nous ne sommes pas là les mains vides. Yavuz, qui a bien préparé son coup, sort de son coffre une bouteille de vin rouge d'Ürgüp, des verres et trois sièges. La Cappadoce est la région de Turquie la plus célèbre pour son vin. En voyant tous ces paysages arides, on se demande bien où les vignes poussent.
Ürgüp, Cappadoce, Turquie le 10 juillet 2022
La nuit fut fraîche et reposante. Les cavités ont la particularité de garder une température constante toute l'année. Idéal été comme hiver. L'humidité est peut-être le seul point négatif.
Aujourd'hui, nous avons décidé de rester dans notre village. Ürgüp n'est pas sans intérêt, bien au contraire. Nous parcourons son centre-ville et nous nous rendons chez les commerçants recommandés par Yavuz pour faire nos emplettes, le maraîcher, le boulanger, le boucher. C'est ce qui fait le charme de notre voyage.
Nous explorons également les cavités troglodytes qui surplombent la ville, juste au-dessus de là où nous vivons. Il y a celles qui n'ont pas été restaurées et que l'on peut visiter et les autres qui ont été transformées en hôtels de luxe et qu'on ne peut qu'admirer de loin.
Cappadoce, Turquie le 11 juillet 2022
Cette journée de repos nous a fait du bien. Place maintenant à l'aventure. Nous montons de bon matin dans le dolmus pour Göreme. L'objectif de la journée est de faire le tour de deux vallées emblématiques de Cappadoce, les vallées Rose et Rouge.
Armés de nos pique-niques et de quelques litres d'eau, nous longeons d'abord des pistes 4x4 très sablonneuses. De nombreux tours opérateurs proposent en effet aux touristes pressés de faire une partie du trajet en quad. La poussière soulevée et le bruit des moteurs n'ont rien d'idyllique. Nous quittons vite leur trajet pour nous engager sur de plus petits sentiers.
Soudain, deux voitures nous dépassent sur la toute dernière portion accessible aux véhicules. Que peuvent-ils bien faire là ? En arrivant à leur niveau, on comprend que nous allons assister à une véritable séance photo. Robe de mariée et costume, caméra stabilisée, appareil photo et drone sont de la partie. Le rendu sera certainement sublime !
Cet endroit marque également le début de la vallée Rose. Nous nous enfonçons sur des sentiers pas toujours bien balisés, cernés de toutes parts par des roches allant du blanc au rose pâle. De nombreux arbres fruitiers, principalement des abricotiers, ont été plantés sur un sol très aride. Un petit filet d'eau se fraye cependant un passage au fond de la vallée. Cela semble être suffisant à toute cette nature pour pousser, tant les arbres croulent sous les fruits en ce mois de juillet.
Nous longeons de temps en temps des églises orthodoxes et des habitations troglodytes abandonnées depuis longtemps. Elles nous renvoient au début du christianisme, à une époque où les chrétiens grecs se réfugièrent ici afin de fuir les persécutions des Romains. Par la suite, de véritables villes fortifiées souterraines ont été créées afin de se protéger des invasions successives des arabes. La région est en effet composée de tufs volcaniques faciles à creuser, ce qui a permis l'établissement de véritables colonies.
Nos pérégrinations continuent jusqu'à un passage délicat. Il s'agit de monter à flanc de falaise sur les hauteurs de la vallée. L'exercice est à la limite de l'escalade ce qui le rend très excitant. Je me charge des deux sacs à dos tandis que Clémence monte en tête. Un en bas, une en haut. Nous glissons beaucoup et progressons lentement mais sûrement. Nous finissons par arriver tout en haut, bien aidés des deux cordes fixes solidement accrochées.
Vue du haut, la vallée est somptueuse. On devine encore mieux le travail de l'érosion sur ces roches tantôt déchiquetées, tantôt lisses. La topologie de la Cappadoce est unique, ce n'est pas pour rien qu'elle est si réputée. Nous poursuivons notre chemin jusqu'à la vallée Rouge et croisons pour la première fois d'autres randonneurs. Certainement arrivés en car, il se cantonnent à certaines portions du chemin, ce qui nous laisse beaucoup de liberté pour nous retrouver seuls dans cette nature.
La vallée Rouge est bien plus luxuriante que la vallée Rose, mais son surnom est plus difficile à cerner. Un serpent croise même notre route ce qui est loin de me faire plaisir. Les sentiers deviennent encore plus labyrinthiques et certains passages en descente sont très glissants. Avec tous ces détours, la randonnée qui devait être facile et ne prendre que 2h30 s'allonge. Nous croisons quelques cafés au milieu de nul part. Les turcs ont décidément le sens du commerce.
De retour sur la plaine 4x4, nous grimpons une dernière colline et apercevons enfin Göreme et bien plus loin le château d'Uchisar qui domine les environs. Le retour à la civilisation est un peu brutal à cause des nombreux quads de touristes à la queue leu leu qui croisent notre route. Nous aurons fait au total 13 kilomètres au lieu des sept annoncés.
Pour finir la soirée, nous avons promis à Yavuz de lui préparer des lasagnes. Pas le temps de chômer, nous nous mettons aux fourneaux dès notre retour à la maison. Les lasagnes à la bolognaise sont délicieuses, cela fait plaisir de retrouver des goûts familiers. Sauf qu'avec Yavuz, impossible de prendre notre temps. Sitôt le plat terminé, il nous embarque à nouveau en voiture pour profiter d'un coucher de soleil face à la vallée de l'imagination.
S'ensuivent un thé à Avanos, une belle vue sur Göreme de nuit et une glace à Ürgüp chez Ikram. Notre séjour avec Yavuz nous apprend à se laisser porter. Avec lui, impossible de savoir ce qu'il va se passer cinq minutes plus tard.
Quelle belle journée !
Göreme et Ortahisar, Cappadoce, Turquie le 12 juillet 2022
Le lendemain, surprise, Maren et Gerrit nous ont donné rendez-vous l'après-midi au musée en plein air de Göreme. On l'a dit, jamais deux sans trois. Plus on les revoit et plus on les apprécie. Heureusement car le musée ne vaut pas vraiment la peine d'être visité.
Nous montons donc à bord de leur van jusqu'au château d'Ortahisar au sud de la Cappadoce. La montée est assez ludique avec des échelles au dessus du vide. Si tu as le vertige, n'y va pas. Si tu ne l'as pas, il en vaut la peine car la vue au sommet est imprenable sur les environs.
Nous terminons cette petite journée à Ürgüp à déguster une crème glacée délicieuse. La texture très crémeuse et presque élastique des glaces turques mérite à elle seule le détour. C'est d'autant meilleur que chez Ikram tout est fait maison, parole de Yavuz.
De Göreme à Uchisar, Cappadoce, Turquie le 13 juillet 2022
Nouvelle journée avec Maren et Gerrit. On se rejoint assez tôt au point de rendez-vous d'une nouvelle randonnée sur les hauteurs de Göreme. Au programme aujourd'hui : la vallée de l'Amour, la vallée Blanche, le village d'Uchisar et son château et la vallée des Pigeons, rien que ça. C'est parti !
Contrairement à avant-hier, le départ de rando est plutôt facile. Après une courte montée depuis Göreme, nous commençons par longer les hauteurs de la vallée de l'Amour jusqu'à en trouver un accès en pente douce. Une fois dans la vallée, les kilomètres s'enchaînent sur un terrain presque plat. Nous tombons sur de nombreux abricotiers sauvages débordant de fruits bien mûrs, nous en remplissons un bon sac.
Les sentiers sont assez faciles à suivre et consistent pour un bout à remonter le lit d'une rivière, presque à sec à cette saison. L'humidité qu'elle apporte permet à une végétation de plus en plus dense de pousser. Au milieu de toute cette flore, des cheminées de fées, assez étroites et longues apparaissent. Pourquoi cette vallée s'appelle-t-elle la vallée de l'Amour ? À toi de juger.
La suite de la balade nous amène à la vallée Blanche. Beaucoup plus resserrée, sa végétation est encore plus luxuriante. Le chemin devient alors plus compliqué à trouver. Parfois, il nous faut nous courber pour passer sous les broussailles. D'autres fois, nous sommes forcés à devoir escalader les parois pour éviter des arbustes trop denses.
Après de longues minutes de galère, un homme nous hèle depuis le haut du canyon. Il nous indique en fait un meilleur chemin à flanc de roche, ce qui permet d'éviter toute la végétation. Merci pour le coup de pouce. Ce nouveau sentier nous amène hors de la vallée, idéal pour rejoindre notre prochain point de passage : le village d'Uchisar. Impossible de le manquer, son château est le point culminant de toute la Cappadoce.
Avant d'entamer la montée, nous nous installons au pied d'un arbre pour pique-niquer. C'est l'occasion de manger deux trois abricots récoltés plus tôt dans la journée. Délicieux. Nous décidons ensuite de faire une seconde pause dans un superbe café à mi-pente. Le panorama est juste sublime. Tandis que Maren et Gerrit font le tour du village, nous montons Clémence et moi au sommet du château. Les escaliers sont moins vertigineux que celui visité deux jours plus tôt. La visite n'en est pas moins intéressante notamment grâce à la petite exposition de tableaux à l'entrée.
Maren et Gerrit, qui n'étaient pas sûrs de faire toute la boucle, se motivent à rentrer avec nous via la vallée des Pigeons. Cette dernière s'avère bien plus abrupte que les précédentes, impossible de descendre tout droit. Nous passons de longues minutes à chercher la voie d'accès. Quand soudain, deux français surgissent de nul part et nous indiquent la bonne direction. Il s'agit en fait de revenir sur nos pas en suivant le relief.
De retour à Göreme, l'heure est venue de quitter pour de bon nos copains allemands. Nous ne nous reverrons plus durant ce voyage, la Cappadoce est en effet le point le plus à l'est de leur trajet. Nous les quittons avec un petit pincement au coeur. Le voyage est ainsi fait de rencontres et d'aurevoirs.
Auf Wiedersehen !
Göreme, Cappadoce, Turquie le 14 juillet 2022
Le réveil sonne vers 4h du matin nous réveillant en sursaut. Nous nous habillons comme des automates, récupérons nos sacs préparés la veille et sortons. Ce matin, nous devons assister au spectacle emblématique de la Cappadoce : le vol des montgolfières.
Sauf que n'habitant pas à Göreme et ne possédant pas de véhicule, nous n'avons pas trouvé de meilleure option qu'un taxi pour nous y amener. La deuxième difficulté, c'est que parfois les conditions météo empêchent le vol, mais ça, on ne le sait qu'au dernier moment.
Le taxi nous amène là où nous avons commencé notre randonnée autour des vallées Rose et Rouge. Il n'est pas encore 5h et la nuit noire nous fait douter. Les montgolfières vont-elles décoller ? La présence de centaines de véhicules nous rassure une fois sur place. Il s'agit maintenant de trouver le meilleur endroit pour assister au spectacle.
Nous avisons au loin une petite butte au pied de plusieurs cheminées de fées. Deux montgolfières s'apprêtent d'ailleurs à prendre leur envol. Le spectacle commence alors que nous nous approchons. Les ballons s'illuminent successivement dans l'obscurité. Bien que le jour soit en train de se lever, on distingue parfaitement les flammes émises par les brûleurs qui permettent de gonfler les ballons d'air chaud.
La magie opère lorsque nous apercevons les premières montgolfières s'élever dans les airs. Une, puis deux et bientôt des dizaines envahissent le ciel. Il n'y a pas un point unique de décollage, elles sont partout, tout autour de nous. Certaines se faufilent dans les vallées à seulement quelques mètres du sol tandis que d'autres sont déjà haut dans le ciel.
Nous décidons de changer d'endroit pour profiter d'un autre point de vue, encore plus en hauteur. Nous rencontrons alors Amélie et Jonas, un couple de parisiens en vacances en Turquie. Ils sont arrivés au pas de course pour ne pas manquer le moment. Très sympathiques, nous assistons ensemble à un second décollage en plein jour cette fois-ci tout en discutant de tout et de rien.
Plus les minutes défilent et plus il y a d'activité autour de nous. Entre les mariées aux robes toujours plus impressionnantes, les balades à cheval, les safaris en 4x4 qui manquent d'écraser nos sacs à dos et l'atterrissage des montgolfières directement sur les remorques, nous ne voyons pas le temps passer.
Après trois heures, nous sommes les derniers sur place. Le premier bus est à 8h15, ce qui nous laisse pile assez de temps pour prendre un thé de bon matin. De retour à la maison, nous nous écroulons de fatigue mais avec de superbes images en tête.
Cette après-midi, Yavuz nous a chargé d'une mission : acheter des légumes et des bières. Il accueille en effet un ami à lui pour les deux prochaines nuits et souhaite nous cuisiner à tous les trois un plat typique turc, un sac tava.
Préparé à base d'agneau, le sac tava contient bien sûr tous les indispensables de la cuisine turque, à savoir des tomates, des poivrons et des oignons. Tous les ingrédients sont coupés finement et incorporés petit à petit dans une grande poêle appelée saç. Toute la saveur du plat vient de sa méthode de cuisson à feu vif (dans notre cas sur un feu de bois).
Ce dîner est l'occasion pour nous de rencontrer l'ami de Yavuz, Mustafa, qui arrive directement des Pays-Bas. D'origine turque, cela fait presque 30 ans qu'il vit là bas et il souhaite désormais revenir vivre en Turquie. Nous passons une superbe soirée entre dégustation et discussion.
Ürgüp, Cappadoce, Turquie le 15 juillet 2022
Après une semaine aussi intense, nous avons bien besoin d'une journée de repos. Comme souvent ces jour-là, nous essayons de nous projeter dans le futur afin de réfléchir à l'après Turquie. Pas si simple.
Nous profitons tout de même de cette dernière journée en Cappadoce pour faire un petit tour en ville. À notre grande surprise, des drapeaux turcs ont été installés partout. Des banderoles géantes à l'effigie d'Atatürk, le fondateur de la Turquie moderne, et d'Erdogan, l'actuel président, ont même été déployées sur les hauteurs de la ville. En nous renseignant, nous apprenons que le 15 juillet est un jour férié en Turquie. Il commémore les victimes du coup d'état de 2016.
De retour à l'appartement, nous profitons d'une soirée au calme puisque nos deux voisins de chambre sont de sortie.
Notre semaine en Cappadoce fut belle, riche en découverte et intense. Parfois, quand un lieu est trop attendu, trop grand public, il nous déçoit. Ce ne fut pas du tout le cas ici.
Nous savions qu'il y avait des montgolfières par centaines, des habitations troglodytes et des cheminées de fées. Sauf que pour une fois, la réalité est bien plus impressionnante que toutes les photos ou les vidéos qu'on a pu voir auparavant.
Il est difficile de décrire cette sensation d'immensité lorsque l'on se retrouve en haut d'un canyon désertique, la beauté des montgolfières qui dépassent de l'horizon au petit matin ou encore les couleurs rougeoyantes indescriptibles des couchers de soleil. Cet endroit a le pouvoir de réveiller notre curiosité enfantine qui nous pousse à vouloir tout explorer, tout escalader.
Et finalement, quelle joie de voir qu'il est encore possible de se retrouver tout seul et de sortir des sentiers battus très facilement, dans un lieu pourtant sensible au tourisme de masse. C'était peut-être notre plus grande crainte et elle a été bien vite levée, lorsque Yavuz nous a amenés sur les pistes.
Alors voilà, nous ne regrettons pas le moins du monde d'être venu ici et d'avoir pris le temps d'apprécier ces lieux à leur juste valeur. Nous en avons même laissé pour plus tard. Qui sait, nos pas nous amèneront peut-être à nouveau en Cappadoce ?
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Merci d'avoir lu jusqu'au bout ❤️
Après s'être posés une semaine en Cappadoce, il est temps de reprendre la route. Cap à l'est de la Turquie !
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