Journal de bord en Géorgie 🇬🇪 : volontariat au Gipsy village
Après plus de six mois d'itinérance, nous avons tous les deux envie de poser nos sacs à dos. Moins de transport, de marche et de visite. À l'inverse, plus de rencontres au long terme, d'expériences nouvelles et d'apprentissages en tout genre.
L'heure est venue de faire une petite pause dans notre voyage.
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En février dernier, la veille du grand départ, nous avons noté tous les deux une ou plusieurs expériences que nous souhaitions vivre durant ce périple. Le volontariat dans une ferme (woofing), un projet de rénovation ou de construction en faisait partie.
Le moment nous semble opportun d'en effectuer un, d'autant plus que la Géorgie s'y prête bien. Il est en effet possible d'y séjourner un an sans avoir besoin de visa. Sans date butoir, il est bien plus facile de s'arrêter quelques semaines.
Notre choix s'est porté sur le Gipsy village. Il se situe à Assouréti, à une quarantaine de minutes de Tbilissi. Ils recherchent des volontaires afin de les aider à construire un éco-camping communautaire, ainsi qu'une petite ferme maraîchère. Leur projet nous séduit tout de suite et nous laissons un message à Anna et Nikita sur la plateforme Workaway.
Nikita nous répond et nous informe que deux places se libèrent au village cette semaine. Cela concorde à peu près avec la fin de notre périple en Kakhétie dans l'est de la Géorgie.
Nous y voilà, ce sera notre premier volontariat.
Jours 197 à 199 🇬🇪 - Arrivée au Gipsy village
Assouréti, Géorgie du vendredi 19 au dimanche 21 août 2022
Nous descendons du marshrutka dans le petit village d'Assouréti, nos sacs sur le dos. L'architecture de l'église et des maisons alentours nous surprend, on pourrait se croire en Allemagne. Et pour cause. Anciennement appelé Elisabethal, le village fut fondé en 1818 par des immigrés allemands. Ils seraient venus là par superstition religieuse. En effet, craignant un nouveau déluge, la proximité avec le mont Ararat leur aurait inspiré cette destination.
Une vingtaine de minutes de marche sur un chemin de campagne nous amène directement au Gipsy village. Un mélange d'excitation et de stress anime nos pas. Nous ne savons pas vraiment où nous allons débarquer, qui nous allons découvrir, ni comment ça va se passer.
Nous franchissons timidement le portail coloré qui garde l'entrée des lieux. Nous sommes vite accueillis par Ray, un américain aux cheveux longs et bruns. Un bol de mûres à la main qu'il distribue à tout va, il nous fait faire le tour du site tout en nous présentant aux autres volontaires.
Composé de plusieurs espaces, le Gipsy village nous surprend par sa taille. À côté de l'entrée se trouvent deux maisons d'habitation et deux corps de ferme rénovés. Couverts de fresques multicolores, les quatre bâtiments accueillent les chambres d'une partie de l'équipe, le cellier, l'atelier ainsi que le futur restaurant, encore en plein aménagement.
Une rivière coule le long de la propriété à la lisière de la forêt. Ray nous y amène et nous découvrons un grand pavillon à cheval sur l'eau. De longues tables y sont installées, prêtes à accueillir tout le monde. Nous repartons après avoir pris un café de bienvenue.
Un peu plus loin encore, en descendant le cours d'eau, nous tombons successivement sur un sauna, une piscine, une dizaine de tipis et un petit potager. Tout n'est pas terminé, mais c'est là que se trouvera le futur camping. Ray nous glisse d'ailleurs à l'oreille que les premiers hôtes devraient arriver la semaine prochaine.
Nous empruntons alors un chemin blanc à travers les bois. Il mène tout droit à un grand potager où se dressent plusieurs serres. Ici, les légumes sont cultivés en suivant les principes de la permaculture. En voyant les rangées de tomates, de poivrons, de choux et de carottes, j'ai comme dans l'idée que nous n'aurons pas le temps de chômer ici.
Anna prend le relais et nous invite à choisir nos lits dans un grand dortoir plutôt confortable à mi-chemin entre le pavillon et la piscine, parfait.
Mais laissons cela pour plus tard. Nous sommes vendredi, et qui dit vendredi, dit weekend. Ici, personne ne travaille les samedis et dimanches. À la place, nous apprenons qu'un bivouac d'une nuit a été programmé. Ils nous invitent à les rejoindre, nous déclinons pour cette fois et profitons de ces deux jours libres pour apprivoiser les lieux et apprendre à connaître ceux qui sont restés.
Le temps passe à une vitesse folle entre la sortie en buggy, les deux après-midis piscine et les parties de kubb, un jeu de quilles proche du mölkky. N'oublions pas les soirées mémorables à boire du vin et à chanter tous ensemble.
Jours 200 à 206 🇬🇪 - Première semaine : le temps des découvertes
Assouréti, Géorgie du lundi 22 au dimanche 28 août 2022
Le réveil sonne à 6h30, nous avons rendez-vous devant le pavillon à 7h. Nous enfilons rapidement un t-shirt, un pull et un pantalon. Ça y est, nous sommes fin prêts pour démarrer notre premier jour de travail.
La journée commence doucement par un café, le temps que tout le monde nous rejoigne. Nous prenons nos instructions d'Anna et plusieurs tâches sont au programme aujourd'hui. Tandis que Clémence se rend au jardin avec les autres pour récolter la production du jour, je suis chargé de faire le tour des fleurs pour les arroser.
9h. Un message sur la conversation commune nous arrête dans notre lancée.
« Breakfast is ready! »
Retour au pavillon. Alissa et Micha, deux Russes, nous ont concocté un porridge bien consistant. Les autres ne semblent pas étonnés, mais de notre côté, c'est une première. Nous avons l'habitude de manger du pain et de la confiture, plutôt que ce plat à la texture un peu particulière.
La suite de la matinée est consacrée à aménager un nouvel espace près des corps de ferme. Il est destiné à remplacer le pavillon, qui sera quant à lui réservé aux hôtes du camping.
Nous découvrons par la même occasion le rythme de la vie au Gipsy village par temps chaud. Le travail s'arrête vers 11h et ne reprend qu'à 17h, lorsque la température est plus agréable. Le déjeuner est servi à 13h30 et le dîner à 19h30.
La semaine passe vite. Les journées s'enchaînent et nous prenons petit à petit nos marques. Je cesse pour ma part de me lever si tôt et préfère travailler plus longtemps en journée. Nous nous occupons d'un peu tout selon les besoins du moment. Les jours passent et ne se ressemblent pas. Les tâches vont de la récolte des tomates, des poivrons, des concombres et de tous leurs amis, au nettoyage du cellier. Nous consacrons même notre journée du vendredi à trier les plastiques et les bouteilles en verre, dans le but de recycler le plus possible de déchets. Je pense que c'est inédit en Géorgie.
Nous alternons beaucoup les binômes, ce qui nous permet à tous les deux de faire plus ample connaissance avec le reste de l'équipe composée d'Ali l'iranien, d'Emi la danoise, de Marissa la hollandaise et de Ray l'américain. Chacun son caractère et sa vision de la vie, c'est ce qui fait le charme de l'endroit.
Un groupe de travailleurs à plein temps complète notre équipe de volontaires. Les discussions sont plus compliquées avec eux, ils sont presque tous russes et certains ne parlent pas très bien anglais. Les sourires et le langage des signes sont heureusement là pour nous aider. Lucas et Bianca, deux volontaires suisso-autrichiens, nous rejoignent en milieu de semaine, ils connaissent bien les lieux puisqu'ils ont déjà passé deux semaines ici le mois dernier. Ils sont de retour pour cinq jours afin de faire étape vers l'Arménie.
Vendredi après-midi arrive. Déjà ! Alan le kazakh s'est rendu un peu plus tôt à Assouréti afin d'acheter du vin géorgien. Il s'avère moins bon que celui goûté en Kakhétie. Mais bon, il coûte à peine 1€ le litre ce qui compense un peu le mal de tête assuré le lendemain.
Nous allumons un feu et passons la soirée à chanter et à essayer de nouveaux instruments tel que le hang. Il a la particularité de toujours sonner juste, peu importe l'expertise du musicien qui le tient entre les mains.
Nous nous mettons en quête samedi après-midi de mûres sauvages afin d'accompagner les crêpes du dimanche que nous nous sommes proposés Clémence et moi de cuisiner. Après une semaine de porridge, nous souhaitons retrouver un peu nos marques. Sur les bonnes indications de Ray, nous en récoltons un bon nombre près d'un barrage abandonné. C'est aussi l'occasion pour nous de sortir un peu de la propriété.
La dégustation de crêpes est appréciée de tous. Mais nous assistons à une première ! Les Russes ne jurent que par le lait concentré ! Très sucré et avec une texture proche du nutella, cette pâte blanche a quasiment recouvert chacune de nos crêpes. Personnellement, je préfère la version confiture et fruits frais mais finalement, pourquoi pas.
Cette première semaine nous a tant enchantés que nous décidons de rester jusqu'au lundi suivant.
Jours 207 à 213 🇬🇪 - Deuxième semaine : le temps des amitiés
Assouréti, Géorgie du lundi 29 août au dimanche 04 septembre 2022
Une nouvelle semaine commence. Bianca et Luca nous quittent déjà. Nous nous sommes bien attachés à eux et pourtant cela ne fait que quelques jours qu'ils sont là.
Nikita est quant à lui arrivé ce week-end tout comme Amira et Fred, deux nouveaux volontaires allemands. Nous nous mettons tous à l'oeuvre pour construire une extension de la cuisine.
Les jours passent et nous nous lions de plus en plus d'amitié avec tout le monde. Les russes se mettent à l'anglais, nous nous mettons un peu au russe. Le reste du temps, impossible de s'ennuyer entre les soirées jeux de société ou film, les parties d'échecs et la chasse aux vaches.
On discute beaucoup des projets des uns et des autres, de la suite de notre voyage et des possiblités qui nous sont offertes de continuer plus à l'est. Il y a de fortes chances que nos chemins se croisent à nouveau d'ici quelques semaines ou quelques mois. Cette perspective nous plaît énormément à tous.
En regardant les prévisions météorologiques, nous nous rendons compte Emi, Clémence et moi que le temps va changer en début de semaine prochaine. Nous décidons tous les trois de prolonger encore un peu plus notre séjour au Gipsy village afin d'éviter de voyager sous la pluie.
Mais ce n'est pas tout, puisqu'il fait beau, nous nous mettons en tête avec Emi de partir pour une randonnée en itinérance dans le Grand Caucase. Quatre jours en autonomie du jeudi au dimanche à vagabonder entre 2000 et 3000 mètres d'altitude et à admirer les étoiles, un régal.
De son côté, Clémence profite des joies de la piscine avec Alan et Micha. Son bronzage sera parfait pour passer un bel été indien.
Jours 214 à 221 🇬🇪 - Troisième semaine : le temps des aurevoirs
Assouréti, Géorgie du lundi 05 au dimanche 11 septembre 2022
Les retrouvailles avec Clémence sont chaleureuses et joyeuses, plus que le temps qui vire rapidement à la pluie. Septembre commence sous de mauvais auspices, nous n'avons pas connu de telles précipitations depuis près de trois mois. Je regrette déjà les températures estivales.
Sacha, un troubadour chanteur de Saint-Pétersbourg et Pilou, un cycliste corse sont arrivés durant le week-end. Tout change si vite ici, pour notre plus grand plaisir.
La semaine commence par les traditionnels aurevoirs. Cette fois-ci, c'est au tour de Franck de s'en aller. Son départ est tout aussi mémorable que le personnage qu'il est. On se demande tous s'il va réussir à se rendre au Japon avec autant d'équipements. C'est tout le bien qu'on lui souhaite en tout cas. Son vélo est si lourd qu'il ne faut pas moins de six personnes pour le charger dans le buggy.
Peu après son départ, nous entendons les cloches sonner et les chiens aboyer. Il ne s'agit pas de sonner le glas de notre ami Franck, mais seulement de la barrière qu'il vient de passer trois semaines à construire. En effet, le camp est sujet à des invasions de... vaches. Après avoir attaqué les maïs du grand potager, elles ont décidé de s'en prendre à l'herbe bien verte du Gipsy village, faisant fi des barbelés. Leur venue presque quotidienne est à chaque fois propice à une grande mobilisation afin de les faire partir au plus vite. Les joies de la campagne.
Le fil rouge de cette semaine est bien entendu consacré aux tomates qui poussent à profusion dans le jardin. La quantité est telle que tout le monde en rêve la nuit. On parle de plus de 300 kilogrammes chaque semaine. À ce sujet, tous les moyens sont bons pour essayer d'écouler la production et d'en perdre le moins possible. Nous les cuisinons séchées, en salade ou en sauce. Ce n'est pourtant pas suffisant et nous déplorons pas mal de pertes.
En parlant de cuisine, après les crêpes, nous nous attaquons à un autre classique de la cuisine française : les gaufres. Nous nous sentons bien seuls lorsque nous expliquons à tous les autres que nous aimons finir nos repas par une touche sucrée. Eux ont pour habitude de ne manger qu'un plat bien consistant et beaucoup de pain. Je doute que nous arriverons à les faire changer d'avis, mais au vu des nombreux compliments que nous avons reçu, la recette de papy Bernard semble avoir fait mouche. Merci papy ❤️.
Nous profitons du mieux que nous pouvons de nos derniers jours de volontariat. Et oui, nous avons pris la décision de partir à la fin du prochain week-end. Cela fait déjà trois semaines et nous ressentons le besoin de reprendre la route. En attendant, une fête est annoncée samedi. Le moment parfait pour tirer notre révérence.
De la bière, de la musique un peu trop électro et beaucoup de rigolade, notre soirée de départ est tout simplement parfaite. Il semble même que je me sois retrouvé nu à 2h du matin dans la piscine avec Fred et Emi. Le pouvoir de conviction des danois et des allemands est trop fort.
Assouréti, Géorgie le lundi 12 septembre 2022
L'heure est venue de quitter ce petit havre de paix. Nous étions venus pour quelques jours reconductibles, nous sommes restés plus de trois semaines. Que le temps passe vite ! C'est la larme à l'oeil que nous disons au revoir à tout le monde. L'ultime occasion de prendre une photo tous ensemble et de se souhaiter le meilleur pour la suite.
Plus que le travail parfois ennuyant, nous retiendrons surtout tous ces beaux moments passés à jouer de la musique autour du feu, à raconter nos meilleures annecdotes sous les étoiles, à sauter dans la piscine, à suer dans le sauna, à couper et à récolter de délicieux légumes, à chasser les vaches dans la rivière, à creuser des trous et peindre des planches et à rigoler de tout et rien.
Nous nous souviendrons pour toujours de tous ces instants d'entraide, de ces réflexions profondes sur la vie et de ces fous rires inarrêtables. Finalement, la vie est bien faite puisque, peu importe notre parcours de vie, nous nous sommes tous retrouvés là au même endroit, au même moment.
Au fond, vivre en communauté à plein temps, c'est en quelque sorte vivre une vie en accéléré. Les amitiés qui en découlent sont solides et les sentiments sont exacerbés. Nous créons petit à petit une belle famille d'ami-voyageurs qu'il nous tarde de revoir. Aux traditionnels « best food, best life » scandés à longueur de journée par Franck et Kamo, nous rajouterons désormais « best friends ».
Merci les amis d'avoir partagé ces trois semaines avec nous.
À bientôt sur les routes !
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Merci d'avoir lu jusqu'au bout ❤️
Ces quelques semaines de woofing nous ont fait beaucoup de bien. Désormais, le voyage continue. Notre première étape, Tbilissi, une capitale que nous pensions bien connaître mais qui va encore nous apporter quelques belles surprises.
Plus qu'un blog voyage, nous partageons nos péripéties au fur et à mesure de notre aventure comme on les vit, avec passion et sincérité. Si tu veux nous adresser quelques mots, tu peux nous contacter sur nos pages Instagram : Clémence et Adrien.
Plusieurs images de cet article ont été prises par Anna Koroliova.