Journal de bord en Albanie du sud 🇦🇱
Après avoir découvert le très montagneux Monténégro, notre route vers la muraille de Chine nous mène en Albanie, un pays dont on a très peu entendu parler, réputé pour la gentillesse de ses habitants. En avant =)
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Jours 46 à 49 🇦🇱 - Berat, la ville aux fenêtres sur fenêtres
Berat, Albanie le 21 mars 2022
Nous revoilà une semaine plus tard au même terminal de bus qu'à l'aller, sauf que cette fois-ci, nous continuons notre route vers le sud. Paradoxalement en Albanie, c'est plutôt simple de trouver son bus dans le chaos des gares routières, car il y a toujours quelqu'un pour t'aiguiller. On ne sait pas pourquoi, mais les terminaux de bus sont toujours des hauts lieux de rencontres. Peut-être parce que les locaux savent qu'il y aura toujours un voyageur avec qui taper la discute. En moins d'une minute, nous voilà donc assis dans notre bus pour Berat alors qu'il y avait bien une centaine de bus garés là, prêts à partir.
Nous arrivons à destination vers 14h. La gare routière se situe à environ 4 kilomètres du centre-ville mais puisqu'il fait beau, nous décidons de rejoindre notre logement à pied. « Welcome to Albania », nous disent quelques jeunes croisés sur la route. Le séjour à Berat est lancé.
Nos consignes sont simples : une fois arrivés devant le Conad, le supermarché local, nous devons contacter les parents de Ilir, notre hôte, pour qu'ils viennent nous chercher. Ce dernier travaille en Italie et ne pourra pas être là pendant notre séjour. Mais comment faire lorsqu'on n'a pas de réseau mobile ni de téléphone ? Dans ce cas de figure, les Wi-Fi publics, ou ceux des bars et restaurants sont nos meilleurs amis. Après plus d'un mois de voyage, on a appris à les demander systématiquement. En Albanie, il n'y a même pas besoin de consommer. Les Albanais nous aident volontiers. Notre problème se résout donc sur le toit terrasse d'un hôtel voisin.
Suzanna et son mari nous accueillent chaleureusement avec un bon café. La petite cour, arborée et décorée avec goût, me rappelle un peu le jardin de ma grand-mère. On se sent à la maison. Une fois installés, nous profitons des lumières dorées de cette fin de journée pour flâner dans le centre-ville à la découverte des mille fenêtres.
Enchantés par cette ville classée à l'UNESCO depuis 2008, tout autant que par l'accueil de Suzanna, nous demandons à Ilir s'il est possible de rester une nuit de plus. Il accepte volontiers. Nous voilà avec un peu de temps supplémentaire pour arpenter la ville de fond en comble.
Berat est située sur une boucle de la rivière Osam et chaque rive abrite un quartier. Sur la rive gauche se trouve le quartier chrétien de Gorica. L'autre rive, celle sur laquelle nous logeons, abrite le quartier musulman de Mangalem ainsi que la Kala, une ancienne forteresse posée sur un piton rocheux. La ville nouvelle s'étend plus loin en amont et en aval de la rivière.
Berat, Albanie du 22 au 24 mars 2022
Vers 9h le premier jour, un petit déjeuner copieux nous attend en terrasse. Au menu, nous trouvons pas moins de 6 plats sucrés et salés. Une salade de concombres, de tomates et d'olives, du fromage frais de brebis, de la confiture de prunes, des œufs brouillés ainsi qu'un burek au fromage, sorte de galette d'origine turque dont l'appellation et la recette changent selon les pays. C'en est un peu trop pour nous. Nous en gardons pour le midi.
L'heure est venue de nous rendre à la forteresse. La montée est rude, il y a presque 130 mètres de dénivelés pour seulement 800 mètres de longueur sur des pavés usés par le temps. Plus qu'un château, nous débarquons dans une vraie ville fortifiée. Une fois la porte d'entrée monumentale passée, nous découvrons avec étonnement tout un quartier. Nous retrouvons alors les mêmes maisons ottomanes que dans la ville basse avec leurs fenêtres si caractéristiques.
La forteresse culmine encore plus haut. Nous y grimpons et rencontrons brièvement Éléonore, une française qui parcourt l'Europe en camion aménagé. Comme à Kotor, il est possible d'explorer librement les ruines. J'ai particulièrement apprécié la visite de l'ancienne citerne ottomane. On se croit à l'intérieur d'une cathédrale, sauf qu'au fond, se trouve une eau d'une profondeur insondable. Après avoir fait un large tour des lieux et admiré les magnifiques montagnes qui entourent la ville, nous redescendons déjeuner.
Le soir, alors que le soleil disparaît petit à petit derrière les montagnes, les mille fenêtres s'illuminent à nouveau. Nous admirons ce spectacle, une bière à la main, à la terrasse du bar Antigoni.
Le second jour, le menu du petit déjeuner a un peu changé. Nous dégustons désormais une délicieuse confiture d'oranges, ainsi qu'une assiette composée d'un oeuf poché, de fromage frit et d'une saucisse (type knack) grillée.
Au programme de la matinée, la visite des quartiers chrétiens et musulmans. C'est aussi l'occasion pour nous d'admirer le pont piéton en pierre de Gorica, ainsi que la vue de l'église Saint Michel qui est perchée à flanc de falaise sous le piton rocheux du château. Nous profitons l'après-midi de la cour intérieure de notre logement, qui est baignée par le soleil jusqu'à 15h. C'est l'occasion de partir à la chasse aux tortues. Le jardin héberge en effet quelques spécimens encore en hibernation. Une petite tortue à la carapace violette nous fait l'honneur d'émerger de son sommeil, tout ça pour aller se recoucher 50 centimètres plus loin.
En fin d'après-midi, je convaincs Clémence de remonter à la forteresse pour admirer le coucher du soleil. Nous nous retrouvons presque seuls là-haut et vivons un superbe moment hors du temps. Tandis que l'astre descend sur l'horizon, les montagnes enneigées au loin se teintent d'orange, puis de rose. C'est pour ce genre de moment que nous voyageons. Ces quelques belles images viennent clôturer notre passage par l'ancienne cité de Berat.
Jour 49 🇦🇱 - Les trajets en bus en Albanie
Aujourd'hui, nous partons à la découverte d'une deuxième ville inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2005. Pour cela, nous montons à nouveau à bord de notre transport favori en Albanie : le bus local.
Rien que pour ces moments, je suis contente d'être partie en sac à dos.
Il y a certes des points qu'on pourrait qualifier de négatifs mais qui font partie de l'expérience, comme les routes pas toujours goudronnées, les bus d'une autre époque et les trajets à rallonge. Mais le bus c'est surtout un sacré moment de vie.
Il faut avant tout parler du chauffeur, car bien plus qu'un simple conducteur, il se révèle également standardiste, postier et livreur. Toujours au téléphone, il ne s'arrête jamais. Les locaux montent et descendent n'importe où, sans qu'on comprenne vraiment comment ils savent que tel bus passe à telle heure devant chez eux. Attendent-ils depuis des heures ? Il y a aussi ceux qui arrêtent le bus, non pas pour monter dedans mais pour déposer un colis : pièce auto, télé, tout y passe en échange d'un billet. Subitement, le bus s'arrête tout en klaxonnant et quelqu'un sort de nulle part récupérer son colis, en échange d'un billet là aussi. Et puis, il y a ceux qui hèlent le bus mais il ne s'arrête pas. Et ça, on n'a toujours pas compris pourquoi.
Ici, les horaires son respectés. On part même toujours avec quelques minutes d'avance alors il vaut mieux arriver tôt à la gare routière et guetter le bus pour qu'il ne parte pas sans toi. On a déjà vu plusieurs fois des locaux courir après le bus alors que leurs affaires étaient déjà dedans.
Tu payes en cash, au chauffeur. Tout le monde le même prix, plutôt abordable. En général, le chauffeur récupère son dû durant le trajet à une station essence. Pourquoi ? Car il utilise immédiatement l'argent collecté pour payer l'essence à la pompe. Pratique non ? Surtout vu les prix actuels...
On croise des Albanais plutôt âgés ou plutôt jeunes, jamais de touristes. Quant aux Albanais de notre âge, ils semblent préférer les voitures de luxe. Dans le bus, tout le monde parle avec tout le monde. Par exemple, une mamie va me parler pendant une demi-heure en albanais sans se rendre compte que je ne la comprends pas. Elle finira quand même par lancer un « inglese?, tourist? », toujours avec le sourire. Et puis parfois, quelqu'un parle anglais à bord et ça c'est vraiment chouette car il nous explique un peu mieux le trajet qu'on fait, ce qui se raconte ou par exemple qu'on va s'arrêter prochainement sur une aire pour boire un café.
Le bus permet aussi de découvrir les campagnes alentours. Tu ne roules pas vite en Albanie, alors tu as le temps de voir les champs d'oliviers à perte de vue, les cultures, les montagnes omniprésentes, les travaux sur les routes, les gens devant leur maison et les maisons pas finies avec les étages en attente de construction.
Concernant la route, je stresse pas mal, je sers les dents même parfois mais je ne sais pas comment, ça finit toujours par passer. Adrien lui, dort toujours profondément et généralement bercé par ses podcasts.
En cette fin de journée, et après toutes ces péripéties qui auront duré 3 heures pour faire 160 kilomètres, nous approchons de la ville de Gjirokastër.
Jours 49 à 51 🇦🇱 - Gjirokastër, la ville de pierre
Gjirokastër, Albanie du 24 au 26 mars 2022
Une demi-heure avant d'arriver à Gjirokastër, nous entrons dans la longue vallée du Drino proche de l'endroit où il se jette dans la Vjosa. Le paysage autour de nous est de plus en plus beau au fur et à mesure que le soleil décline. De chaque côté de la vallée, des montagnes enneigées nous rappellent que le printemps n'est pas tout à fait là.
Le bus nous arrête à la station essence de Gjirokastër, un endroit pas vraiment accueillant au milieu du trafic. Sitôt nos sacs à dos récupérés, nous nous empressons de quitter le boulevard principal de la ville nouvelle afin d'escalader une plus petite rue qui mène à notre maison d'hôtes.
Et ça monte ! La ville a en effet été construite sur le versant oriental du Mali i Gjerë, une chaîne de montagnes dont le plus haut sommet culmine à 1800 mètres d'altitude. Avec plus de 12 kilos sur le dos chacun, ce n'est pas une mince affaire d'arriver à destination. D'autant que plus nous nous rapprochons, plus le chemin se complique. La rue est en pleine rénovation, si bien que la chaussée goudronnée laisse vite place à un véritable chantier. Engins, tas de gravats, tranchées dans le sol, la montée devient une véritable course d'obstacles. Nous arrivons finalement devant un portail gris composé de neuf carrés, c'est bien la porte que notre hôte nous a envoyé en photo.
Clémence l'ouvre et nous découvrons alors un joli jardin en terrasse avec une vue dégagée sur la colline voisine, couronnée par l'imposante forteresse de Gjirokastër. Au niveau inférieur de la maison, un homme plutôt âgé semble nous attendre. Il ne parle pas un mot d'anglais, pas plus que sa femme qu'il appelle pour qu'elle vienne nous montrer notre chambre. Celle-ci est sommaire, peu équipée, mais assez grande pour nous deux et surtout propre et chaude, ce qui est un critère important lorsqu'on dort dans les montagnes.
L'heure du repas approche et j'ai faim ! Les quelques kritsinias mangés dans le bus ne m'ont pas vraiment calé. Nous reprenons donc notre ascension en direction des quartiers du bazar et du vieux bazar. La vieille ville se trouve tout en haut, et le restaurant que j'ai repéré, la Taverna Tradicionale, se situe à son sommet. La montée est très rude, mais l'accueil est fabuleux. Verres après verres, plats après plats, parfois commandés, souvent offerts, nous ressortons quelques heures plus tard enchantés et un peu titubants après un dernier verre de raki.
Un soleil radieux baigne la terrasse le matin de notre 50ème jour de voyage. Le temps est vraiment parfait depuis quelques jours. On a même laissé tomber les vestes et ça fait un bien fou. Aujourd'hui nous avons prévu de grimper jusqu'au pont d'Ali Pasha, quelques centaines de mètres plus haut dans la montagne. Ali Pasha de Janina, c'est un sacré bonhomme dans la région. Gouverneur de la région de l'Épire pour le compte de l'Empire ottoman et chef de guerre accompli, il a bravé tour à tour les empires français et ottomans. De nombreuses légendes entourent son histoire. Certains ont même été repris par Alexandre Dumas.
Nous prenons le chemin du quartier historique. Des musiques se font entendre, de plus en plus fortes. Le bazar atteint, nous sommes étonnés du monde présent autour de nous en ce vendredi matin. Un détail nous interpelle, il y a beaucoup d'enfants de tous âges, et ils sont tous déguisés. Puis la foule grossit et il devient difficile d'avancer. Une estrade semble être installée au carrefour de quatre routes. On s'approche tant bien que mal au son très fort de la musique. Sur la scène, des adultes, probablement des professeurs, invitent les enfants des différentes écoles à venir présenter tour à tour un spectacle de danse ou de chant, traditionnel ou moderne. Des confettis volent, on se croirait en plein carnaval. Soudain, un paramoteur sorti de nulle part nous survole sous un tonnerre d'applaudissements. On se laisse prendre par l'ambiance, entourés de petits et de grands.
Après cet interlude festif, on décide de poursuivre notre chemin en suivant les indications de Maps.me et nous nous retrouvons à nouveau devant la Taverna Tradicionale. Le serveur de la veille nous reconnaît et nous renseigne, avec le sourire, sur le meilleur itinéraire à emprunter pour rejoindre le pont. Nous prenons tous ses conseils et commençons à quitter les routes goudronnées pour atteindre des chemins de terre. La forteresse se trouve bien en dessous de nous maintenant, ce qui nous offre un beau panorama. Notre progression est lente à cause des nombreuses pierres sur le chemin. Seules les chèvres sont de la partie. Elles sont bien plus à l'aise que nous d'ailleurs.
Quelques minutes plus tard, nous finissons par arriver au pied de ce fameux pont. Il s'agit en fait d'une partie de l'aqueduc qu'a fait construire Ali Pasha au début du 19ème siècle. Il permettait de remplir les citernes de la forteresse en acheminant l'eau depuis le Mont Sopot, situé à une dizaine de kilomètres de là. Il a malheureusement été démoli en grande partie en 1932 et seul subsiste ce pont qui permet de nos jours de relier les deux flancs de la montagne. Le cours d'eau est à sec en ce mois de mars, mais peut-être que la fonte des neiges va le raviver.
L'endroit est assez magique et très ressourçant. On a l'impression d'être seuls au monde avec les vestiges du passé. Bravant le vent, Adrien lance le drone afin d'immortaliser l'instant. Il est ensuite temps de rebrousser chemin. Avec le gargantuesque dîner de la veille, nous sommes partis de notre maison d'hôtes le ventre est vide et il est l'heure d'y remédier.
C'est la première fois que nous séjournons dans un logement sans cuisine, alors nous devons chercher un lieu pour déjeuner. L'après-midi est déjà bien avancée mais ce n'est jamais un problème en Albanie. On trouve toujours de quoi se sustenter quelle que soit l'heure. Nous poussons la porte d'Edua, une boutique de produits locaux au rez-de-chaussée qui fait aussi restaurant à l'étage. Nous y goûtons notamment la fergese, un plat traditionnel à base de tomates, poivrons et salade de ricotta. Très bon (et pourtant, je déteste les poivrons).
Nous profitons de notre dernière soirée ici pour faire un dernier tour là-haut. Le soir venu, la ville de Gjirokastër se transforme. Les boutiques de souvenirs ferment et laissent place à d'autres commerces. En ce vendredi soir, un DJ a élu domicile devant l'un des bars et c'est toute une rue qui se transforme en piste de danse. Le son est tonitruant et nous connaissons chaque chanson des années 2010.
Gjirokastër est une ville qui a su rapidement nous séduire, en particulier ses quartiers historiques. Tout comme Berat, elle est classée à l'UNESCO et nous avons très vite compris pourquoi. Les murs et les toitures de ses maisons sont traditionnellement faits de pierre ce qui la rend vraiment atypique et lui doit son surnom de « ville de pierre ». On a beaucoup apprécié le fait que la vieille ville soit toujours habitée par les Albanais. Un des facteurs qui l'explique, c'est qu'ici, les rues sont larges. Voitures et bus peuvent ainsi monter jusqu'en haut. À pied, il est vrai que la ville nécessite une sacrée condition physique.
Demain, un bus nous amènera jusqu'à Sarandë, à deux pas de la frontière grecque. À nous la fêta =)
Jours 51 à 56 🇦🇱 - Sarandë, la station balnéaire
Sarandë, Albanie du 26 au 31 mars 2022
Sarandë (ou Saranda), c'est LA station balnéaire du coin. Une bonne semaine d'orages est prévue, alors on a décidé de se poser ici pendant 6 jours et après nous aviserons.
Pourquoi Sarandë ?
- Nous voulons voir la côte albanaise que nous n'avons pas encore découverte.
- C'est facilement accessible en bus.
- Le logement que nous avons trouvé ici, un appartement entier avec terrasse et lave-linge, est à 11€ la nuit. C'est idéal pour se reposer et recharger les batteries.
Nous arrivons en tout début d'après-midi dans un centre-ville en effervescence. Ici, pas de gare routière, les bus et les taxis se garent le long du trottoir pour prendre et déposer des passagers. Nous avons à peine le temps de mettre nos sacs à dos que nous tombons nez à nez avec un jeune homme et ses jumeaux avec qui nous avons sympathisé deux jours plus tôt dans le bus Berat - Gjirokastër. Le monde est petit.
Nous posons ensuite nos sacs à l'appartement et profitons de cette magnifique après-midi pour nous balader le long des plages et sur la grande riva. Il y a du monde aujourd'hui. Certains déambulent une glace à la main, tandis que d'autres boivent un café en terrasse face à de drôles de bateaux pirates au mouillage dans la baie. Juste en face de nous, à environ une heure en ferry, l'île de Corfou nous donne un premier aperçu de la Grèce.
Le lendemain, on se réveille un peu déphasés : ici aussi, on passe à l'heure d'été. On reste pour l'instant sur le même fuseau horaire que la France. Comme prévu, le temps commence à se gâter. Nous ressortons les kways et prenons la direction de la forteresse de Sarandë. Une heure et beaucoup de dénivelés plus tard, nous atteignons le point culminant de la ville. Nous découvrons d'abord le phare qui se dresse au milieu de plusieurs bunkers, puis nous atteignons le château de Lëkurës et son allée couverte de pâquerettes. Rénové récemment, il abrite un café-restaurant et offre un panorama assez incroyable sur la baie de Sarandë d'un côté et sur une grande plaine cultivée de l'autre, avec comme toujours des montagnes au loin.
Nous passons les jours suivants à découvrir les alentours à pied, à commencer par la ville. Nous avons la chance de loger dans une rue qui vit aussi hors saison. Nous apprécions cette petite vie de quartier avec ses épiceries, ses boutiques et ses cafés. Nous découvrons de bonnes adresses. La première est le bar-restaurant Haxhi, qui s'avère parfait pour prendre un verre ou un café, accompagné de généreux tapas offerts, le tout dans une ambiance et une déco à l'américaine. En bonus, il est possible d'admirer la vue sur la baie de Sarandë et l'île de Corfou (sauf quand il pleut, comme pour nous). Dans un autre style, on a beaucoup aimé la cantine Te bequa, pas chère et en plein centre-ville. Les plats sont bons sans fioritures et surtout à la bonne franquette. Et comme c'est une cantine, ils sont tous en vitrine ce qui permet de ne pas se tromper.
Sarandë est une station balnéaire très touristique et une grande partie du front de mer est de fait constituée de nombreux hôtels, de beaucoup de béton et d'énormément de bâtiments en construction.
Le charme de la ville se perd un peu dans toutes ces constructions anarchiques. À l'inverse, dès qu'on s'en éloigne, on découvre une côte peu habitée, avec des petites criques, des tekke bektachi et des moutons, évidemment.
Une petite parenthèse sur le bektachisme s'impose, ordre religieux que nous avons découvert au hasard de nos pérégrinations. « Le bektachisme est un ordre religieux ésotérique dérivé du soufisme, une voie spirituelle et mystique de l'islam sunnite. Comme les autres personnes musulmanes, les bektachis croient en Allah et vénèrent le prophète Mahomet. Mais elles et ils s'écartent des sunnites en vénérant également l'imam Ali, gendre et cousin du prophète de l'islam considéré comme le roi des saints et le guide spirituel – à l'instar des chiites. » Élodie Toto - Le bektachisme, l'islam «cool» qui séduit l'Europe
Le bektachisme possède des rites et cérémonies qui lui sont propres. Les bektachis ne sont par exemple pas tenus de jeûner durant le mois du Ramadan. Leur lieu de culte s'appelle un tekke. Celui que nous avons visité est composé d'un grand hall central magnifiquement meublé et décoré, qui mène à des pièces périphériques. Un des aspects que j'ai trouvé le plus intéressant, c'est que le bektachisme prône la mixité hommes-femmes. Ainsi, celles-ci ne sont pas exclues des cérémonies, ni tenues de porter le voile.
Ces quelques jours nous permettent aussi de planifier la suite du voyage. La météo nous déboussole un petit peu. Devons-nous rester plus longtemps en Albanie ? Passons-nous la frontière maintenant ? Et d'ailleurs, avec quel moyen de transport cette fois-ci ?
C'est ça aussi le voyage, il faut parfois prendre une demi-journée pour chercher et étudier tous les trajets possibles, les logements et arriver à tout faire concorder tant bien que mal. On te laisse un peu de suspense pour la suite de notre itinéraire, mais ce qui est sûr c'est qu'on a décidé de s'offrir une dernière étape albanaise.
Jours 56 à 59 🇦🇱 - Ksamil et parc national de Butrint
Ksamil, Albanie du 31 mars au 03 avril 2022
Après ces quelques jours de repos, nous reprenons la route mais nous n'allons pas très loin. Un petit bus, allemand cette fois-ci, fait le trajet Sarandë-Ksamil-Butrint tous les jours, une fois par heure.
Sac à dos harnachés, nous nous rendons à l'arrêt en face du SOS bar et montons dans le bus de 11h30. Ce qui est bien avec Maps.me, c'est que tous les arrêts de bus sont référencés. Il y a parfois même les tarifs. Cela nous permet de toujours préparer nos petites coupures à l'avance, car ici 1€ correspond à environ 122 lek. Les montants sont vite décuplés. Nous remarquons aussi que tous les prix indiqués sur Maps.me sont en réalité augmentés d'un tiers, très probablement dû à l'augmentation de l'essence et du coût de la vie.
Le trajet est rapide et animé, comme toujours. On a rencontré une allemande à l'arrêt de bus et nous sommes les trois seuls touristes. On commence à avoir l'habitude. On s'arrête à Ksamil à une quinzaine de kilomètres plus au sud. La ville semble bien plus petite que Sarandë. Les grands immeubles ont laissé place à de plus petites vila de deux ou trois étages avec des jardins. Notre appartement pour les trois prochaines nuits se trouve justement dans l'une d'entre elles, la Vila Enxhi. Nous découvrons un grand studio, refait à neuf avec balcon et billard, sous lequel vadrouille un mignon petit lapin.
Orages, vent et pluie sont au programme de la journée, ce qui ne nous empêche pas de profiter des quelques moments de beau relatif pour nous promener sur la côte. Il nous suffit de nous abriter sous les bars de plage en hivernage pour échapper aux averses. Ksamil est une petite bourgade balnéaire agréable avec de magnifiques plages de sable fin (enfin !). Il y en a une dizaine, rien qu'à Ksamil, toutes plus belles les unes que les autres. Pour compléter ce cadre idyllique, nous apercevons juste en face de nous plein de petites îles. Il fait pas si froid mais l'orage nous dissuade de la trempette. On peut facilement s'imaginer l'ambiance estivale ici entre les restaurants, les bars de plage, les pédalos et les chambres à touristes. Franchement, on préfère Ksamil à Sarandë.
Parc national de Butrint, 1er avril 2022 🐟
Pour être honnêtes, nous ne sommes pas venus à Ksamil pour ses plages paradisiaques. À vrai dire, je (Clémence) ne savais même pas qu'il y en avait, mais ce fut une très belle surprise. Nous sommes ici car à 5 kilomètres, au bout de la ligne de bus que nous avons empruntée hier, se trouve Butrint, le site touristique culturel le plus visité d'Albanie.
Le temps est toujours très menaçant, alternant entre pluie et éclaircies, ce qui nous décide pour prendre le bus. Nos kways ne nous ont jamais autant servi. Vive le début du printemps ! Nous retrouvons le même chauffeur que la veille et, en même pas 10 minutes, nous voilà arrivés. Au premier abord, on ne s'en rend pas trop compte à cause de la pluie et du brouillard. Nous sommes trempés et mes lunettes m'empêchent de voir quoi que ce soit (Clémence bien sûr). On s'abrite tant bien que mal à l'entrée du parc.
Butrint est une ville antique portuaire dont la fondation remonte au VIIIème siècle avant JC. Son histoire est riche mêlant plusieurs civilisations et nous avons hâte d'explorer ses vestiges. Il faut d'abord nous acquitter de notre dû : 1000 lek l'entrée chacun, soit environ 8,20€, ce qui représente une sacrée somme pour l'Albanie. Les Albanais ne doivent débourser que la moitié, heureusement pour eux.
À l'entrée, un grand nombre de brochures sont présentes dans pas mal de langues. Nous sommes bien contents d'en trouver une en français. On commence à la lire à l'abris en attendant que la pluie se calme. C'est d'ailleurs Elza qui l'a rédigée lorsqu'elle était guide ici. Merci à toi pour tous tes conseils sur l'Albanie.
Selon la mythologie, la ville antique a été fondée par des troyens fuyant la chute de Troie. Les fouilles archéologiques attestent de fortifications datant du IVème siècle avant JC. Par la suite, Butrint est devenu un lieu de culte dédié à Asclépios, dieu de la médecine. Jules César et Auguste l'ont transformé en colonie romaine, ce qui a permis un essor important de la ville. Le lieu est assez stratégique puisque situé sur la route principale vers la mer Adriatique. Plus récemment, Ali Pasha, encore lui, s'est installé à côté en y construisant un château afin de protéger la région des attaques françaises (merci Napoléon 🇫🇷). Butrint est classé au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1992.
Le site est splendide, sauvage et très riche. Nous sommes presque seuls et l'atmosphère mystique est accentuée par cette météo menaçante. Pendant quelques heures, nous déambulons entre d'anciennes colonnes et fortifications, un théâtre antique, une tour vénitienne et les ruines d'une ancienne basilique, le tout au milieu des pâquerettes, des fleurs de printemps et des tortues ❤️. Nous avons adoré.
Jour 59 🇦🇱 - Retour à Sarandë et départ d'Albanie
L'Albanie c'est fini !
Nous y avons passé 25 jours haut en couleurs et repartons avec mille souvenirs en tête. L'Albanie est réellement notre plus belle découverte de ce début de voyage. Au travers de ces quelques mots, nous essayons de transcrire honnêtement nos impressions, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Tout n'était pas parfait, beaucoup de choses sont à construire et à améliorer, mais en fin de compte, nous ne retiendrons que le meilleur. Nous avons adoré ce pays et ses habitants et on ne peut que t'encourager à t'y rendre et à toi aussi vivre l'expérience albanaise.
Tu l'as compris, c'est avec un petit pincement au coeur que nous quittons le pays. La route épicée de l'Orient nous appelle, mais avant de mettre les voiles plein est, nous gardons encore un peu le cap vers le sud.
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Merci d'avoir lu jusqu'au bout ❤️
Le printemps arrive, il est temps de repartir à l'aventure. Trois heures de bus nous amènent en Grèce.
Plus qu'un blog voyage, nous partageons nos péripéties au fur et à mesure de notre aventure comme on les vit, avec passion et sincérité. Si tu veux nous adresser quelques mots, tu peux nous contacter sur nos pages Instagram : Clémence et Adrien.